La ville de Midgar, être à part entière de
Final Fantasy VII, est divisée en plusieurs secteurs et réacteurs qui sont autant de chapitres dans l'œuvre de Pierre Lovati, qui prend la liberté à partir de la page 237 de s'écarter de cette structure pour étendre un peu plus son propos. L'auteur a également décidé de décortiquer la progression en jeu de manière chronologique, souvent en faisant le parallèle avec le J-RPG d'origine afin de voir comment la modernisation s'est opérée. Mais aussi et surtout en analysant inlassablement ce qui se passe sous nos yeux en jeu, souvent en se reposant sur des interviews. Le tout afin de parvenir à un seul but : montrer que le remake ne refait pas, ne recrée pas, mais plutôt réinvente.
Extreme makeover
Vous l'aurez compris, avec une telle œuvre du patrimoine vidéoludique, le travail est colossal, ce qui se ressent d'ailleurs dans les plus de 300 pages qui attendent ici les joueurs lecteurs. Car en plus de parler du jeu en lui-même, Pierre Lovati prend en amont le temps d'expliquer la genèse de ces deux projets : le Final Fantasy VII sorti en 1997 ainsi que son remake paru en 2020 et premier opus de ce qui s'annonce être une trilogie. Une fois n'est pas coutume, les images et photographies sont relativement nombreuses dans ce livre, ce qui est plutôt rare chez Third Editions. Mais elles ont toujours un intérêt, par exemple pour montrer quelques exemples d'œuvres ayant servi d'inspiration pour l'aspect cyberpunk de Midgar, ou encore lorsque le parallèle est fait entre la destruction du Secteur 7 et la catastrophe de Fukushima.
Le développement du remake est longuement traité dans le livre, dévoilant au passage les petits et gros soucis rencontrés par les développeurs, comme bien souvent dans le jeu vidéo. Et c'est au bout d'une soixantaine de pages que l'on entre dans le vif du sujet, à savoir le jeu en lui-même. Un jeu qui commence à la fois comme celui de l'époque... mais pas tout à fait non plus. Un échange de ping pong qui est omniprésent dans La Saga Final Fantasy VII Remake. Car, pour rappel, le passage à Midgar durait à l'époque une poignée d'heures là où les développeurs fournissent ici plusieurs dizaines d'heures de jeu. Les comparaisons sont donc inévitables et même essentielles pour comprendre comment une œuvre intemporelle a réussi à s'adapter à son temps.
De la fiction à la réalité
Une œuvre qui d'ailleurs est toujours autant d'actualité à cause de ses thèmes forts, comme l'écologie avec la Shinra qui ne cesse d'épuiser les ressources de la planète et de détruire tout sur son passage, mais aussi l'exploitation d'êtres humains avec tous ces ouvriers payés au lance-pierres et littéralement parqués dans des taudis desquels ils n'ont que peu de chances de sortir un jour, mais aussi la manipulation médiatique avec la Shinra – elle encore, forcément – qui balance allègrement des fake news pour se mettre la population dans la poche. Certaines références sont de leur côté bien plus japonaises, avec par exemple l'île de Hashima, l'art du bunraku (spectacles de marionnettes faisant penser aux Fileurs) ou encore les aires de jeux pour enfants qui ont à l'époque fait partie d'une campagne politique du pays.
Au fil des pages, l'auteur détaille aussi des sujets plus ''terre à terre'' lorsque l'on parle de jeu vidéo. Il prend ainsi le temps de présenter en détail certains personnages, d'expliquer comme le système de combat fonctionne – ce dernier n'étant pas le même qu'à l'époque –, de parler de l'aspect visuel ou encore d'indiquer comment les développeurs n'ont pas su éviter certains travers, par exemple en créant des donjons parfois trop longs et répétitifs, la faute à des assets réutilisés et au fait de vouloir multiplier la durée de vie de l'aventure d'origine. Sans oublier bien sûr d'évoquer l'importance de la musique qui vient souligner et renforcer certains passages forts, tout comme le doublage d'ailleurs.
Multivers
L'auteur évoque ainsi les subterfuges utilisés pour que le remake soit PEGI 16 sans pour autant mettre de côté son aspect impactant, et vient aussi parler de l'univers étendu de Final Fantasy VII et de son remake. Il traite donc du DLC dédié à Yufie, mais aussi de Crisis Core et son remaster, de Dirge of Cerberus ou, plus anecdotique, de deux jeux mobiles. De quoi faire un petit tour d'horizon avant de conclure. De notre côté, cela nous permet de refaire le bilan de cette aventure qui peut être clivante pour les gros fans de l'époque. Certains apprécient les petites libertés prises par les développeurs – notamment la fin – tandis que d'autres estiment que leur œuvre de cœur a été salie. Quoi qu'il soit, une chose est sûre : Pierre Lovati a adoré le remake et l'exprime dans toutes les pages de son livre. Il l'a tellement aimé qu'il a pris le temps de le décortiquer point par point pour ouvrir les yeux des joueurs qui auraient pu passer à côté de certaines choses.