Sous le capot, Corsair a fait dans la surenchère de couches : plaque montée sur gasket, huit couches de mousses et films divers, stabilisateurs vissés... L’idée est de filtrer un maximum de vibrations et de pings internes pour donner un son maîtrisé et une frappe plus douce que sur un K70 de base. En pratique, la sensation reste plus ferme : le clavier ne fléchit quasiment pas, ce qui donne une frappe très stable, mais un chouïa moins rebondie que ce qu’on trouve sur certains customs plus souples. La plaque de switches choisie ici est la version translucide, pensée pour laisser passer le RGB à travers la structure. Visuellement, on obtient un halo diffus sous les touches, plus accentué sur les bords et dans les interstices que sur la légende elle-même. On y revient, car c’est à la fois une force et une frustration.
Côté montage, le MAKR75 reste assez « plug and play » pour un kit DIY : la carte est hot-swap, les modules (rotary ou LCD, sans fil) viennent se loger directement sur le PCB avec des guidages clairs (la vidéo est disponible sur YouTube), et la construction se fait couche par couche sans devoir sortir le fer à souder. Dans notre configuration, le module sans fil est installé, tout comme l’écran LCD qui prend la place de la molette. Le clavier devient alors un pavé d’alu compact, fermé, qui pèse son poids mais reste parfaitement jouable en sans fil, posé sur un bureau ou un grand tapis.
Le cœur de la config, ce sont les switches MLX Quantum. On est sur du linéaire pré-lubé en usine, avec un point d’activation à 1,2 mm, une force de 45 g et une course totale de 3,4 mm. Autrement dit : du switch rapide typé gaming, proche de ce que proposaient déjà les MX Speed et autres dérivés, mais avec un habillage Corsair maison. En jeu, le ressenti colle immédiatement à la fiche technique. La course courte et la pré-lubrication donnent une frappe très fluide, sans point dur, avec des activations quasi instantanées. Sur des FPS ou des jeux très nerveux, ça se traduit par des changements de direction très rapides, avec cette petite impression que le clavier anticipe presque les mouvements. Le revers de la médaille, c’est que pour la frappe longue, il faut discipliner un peu les doigts, sous peine d’appuis fantômes dès qu’on laisse traîner les mains. Notre config utilise les MLX Quantum partout, sans switch exotique sur la barre d’espace ou les modificateurs. Résultat : un clavier extrêmement homogène, où toutes les touches répondent de la même façon. Couplé à la plaque translucide et au matelas de mousses, le profil sonore reste contenu, avec un « clack » sec mais relativement propre, sans ping métallique ni caisse de résonance marquée.
Les keycaps Dark Cherry Blossom apportent une vraie personnalité à l’ensemble. Profil Cherry en PBT dye-sub, légendes opaques, couleurs sombres avec motifs sakura sur quelques touches pour casser le côté monolithique. Au toucher, le PBT épais donne cette rugosité légère qui évite de glisser même après plusieurs heures, avec un son un peu plus mat qu’avec de l’ABS. En contrepartie, comme les légendes ne sont pas translucides, le rétroéclairage ne traverse quasiment pas les symboles. L’éclairage se fait donc surtout sous les touches, sur la plaque et entre les rangées. C’est là que la plaque illuminée joue son rôle : elle diffuse les LED pour donner un effet « piscine de lumière » sous le clavier, au lieu de mettre l’accent sur la lisibilité pure. Dans une pièce sombre, l’ambiance est très réussie, mais si on espère lire ses touches grâce au RGB, on peut rapidement être déçu.
Côté connexion, le module sans fil donne accès au trio classique : 2,4 GHz pour le jeu, Bluetooth pour dépanner, et USB-C pour tout le reste. En filaire, le clavier monte jusqu’à 8000 Hz de polling, histoire de cocher la case « hyper polling » à la mode. En 2,4 GHz, on reste sur du 1000 Hz, largement suffisant pour la quasi-totalité des usages. Les tests de latence mettent le MAKR75 dans le haut du panier côté réactivité pure, surtout en filaire, même si, soyons honnête, peu de monde fera la différence à l’aveugle.
Pour l’autonomie, Corsair annonce jusqu’à plus de 150 heures dans les scénarios les plus favorables, mais dans une config réaliste avec RGB actif, module sans fil et LCD en route, on est plus proche de quelques dizaines d’heures de jeu avant de revenir au câble. Suffisant pour ne pas recharger tous les soirs, mais il faut accepter que l’écran et le RGB ne sont pas exactement des amis de la batterie. L’écran, justement, reste le gadget le plus ambigu du lot. Il affiche l’heure, les stats système, des animations, voire un petit visualiseur audio via iCUE. C’est rigolo, ça habille bien le coin supérieur droit, mais en pleine partie, on le regarde très rarement. Surtout qu’il remplace ici la molette, qui, elle, est immédiatement utile pour gérer le volume ou la luminosité.
Reste la question du prix. En barebone, le MAKR75 s’affiche déjà dans le haut du panier des claviers gaming, et si on additionne switches MLX, keycaps Dark Cherry Blossom, module sans fil et écran LCD, on arrive facilement autour, voire au-dessus, de la barre symbolique des 300 euros selon les configurations. Pour un clavier mécanique, même premium, ça commence à piquer, surtout quand on sait qu’il ne gère pas les switches magnétiques MGX Hyperdrive qui arrivent sur d’autres modèles de la marque.
Le MAKR75 n’est pas qu’un bout de métal avec des diodes, c’est aussi le porte-drapeau du nouveau Web Hub de Corsair, cette interface web qui permet de configurer son clavier directement dans un navigateur, sans installer iCUE. On peut y régler macros, remappages, effets lumineux, profils, le tout stocké côté périphérique ou dans le cloud. Dans notre cas, on reste pourtant sur iCUE, parce qu’une fois qu’on a une maison déjà remplie de périphériques Corsair, on ne change pas de religion si facilement. L’application reste lourde, toujours un peu envahissante, mais elle offre un contrôle fin de l’écran LCD, des couches RGB et des profils par jeu. Rien de très surprenant, mais tout ce qu’on attend d’un clavier gaming haut de gamme est là.