Les années 1970. Les chemises à col pelle à tarte, les pantalons pattes d’eph, les moustaches généreuses, les papiers peints psychédéliques, le disco et les lampes à lave. L’âge d’or quoi ! Mais pour vous, Joe, simple balayeur chez Archon, une immense multinationale aux activités obscures, la vie n’a rien d’un rêve, même si vous êtes satisfait de votre sort. Un jour, vous êtes convoqué par votre supérieur pour une promotion. Vous avez désormais, honneur suprême !, accès aux installations les plus secrètes d’Archon... pour y passer la serpillière. Mais sans aucune augmentation de salaire, il ne faut quand même pas déconner. Descendu dans les sous-sols, vous trouvez un vieil homme mourant qui vous demande, dans un dernier souffle, de sauver le monde d’un virus mortel. C’est aussi original que de sauter de tuyau en tuyau pour sauver une princesse me direz-vous ! Eh bien si, ça l’est. Vous comprendrez bientôt pourquoi.
Le gentil flic, le flic qui cogne… Ça se présente mal pour Joe. Mais quel est ce truc clignotant sur la table ?
Back to the Future (sans DeLorean mais avec une montre à gousset)
Pauvre et naïf Joe, vous n’aviez rien demandé à personne et vous vous retrouvez avec un poids bien lourd sur les épaules. Avant de mourir dans vos bras, très original là aussi, le vieillard vous a remis un petit boîtier muni d’un unique bouton. Vous vous rendez rapidement compte que, en pressant sur ce bouton, vous pouvez voyager à volonté entre le présent (l'année 1972) et un futur désolé dans lequel l’humanité s’est éteinte. Il faut retrouver le vieillard, encore jeune scientifique incompris dans le présent (oui, moi aussi cela me rappelle quelque chose, soyez patients), et l’aider à trouver un remède contre l’épidémie foudroyante qui a exterminé l’espèce humaine, entre 1972 et 2012 (date de sortie initiale du jeu sur mobiles et époque joyeuse du futur post-apocalyptique). Il va aussi falloir comprendre pourquoi la civilisation s’est brutalement effondrée, alors que tout le monde vous croit bon pour la camisole de force, tels Cassandre ou Bruce Willis dans L’Armée des douze singes pour les moins hellénistes.
« I am a lineman for the county and I drive the main road... »
En voyageant ainsi à volonté et instantanément dans le temps mais pas dans l’espace, vous avez accès à deux versions de chaque tableau. Rapidement, vous vous mettrez même à jouer au jeu des sept erreurs en admirant les graphismes lisses et épurés qui devraient même satisfaire ceux à qui le pixel art finit par donner des envies de meurtre. Même l’interface a été pensée aussi simple et efficace que possible.
Si une porte est fermée à clé dans le présent, peut-être réussirez-vous à l’ouvrir dans le futur ou inversement. Un objet trouvé dans une époque sera peut-être utile dans l’autre et une action dans le présent modifiera le futur. Cela rappellera à certains les casse-têtes de Day of the Tentacle de Lucasarts (remasterisé en 2016 par Double Fine Productions) où l’on doit naviguer entre trois époques différentes.
Ce hippie vous casse les oreilles avec ses fausses notes et la guerre au Vietnam ?
Un petit tour dans le futur devrait réussir à le calmer.
Mon balai, ma blouse et mon boîtier : paré à sauver le monde !
Dans The Silent Age, on passe ainsi son temps à voyager d’une époque à l’autre. Certes, une fois que l’on a compris le principe, cela peut devenir laborieux. Surtout lorsque l’on fait de longs allers-retours pour aller chercher un objet quelque part et l’utiliser à l’opposé, en ayant dû changer trois fois d’époque pour franchir les obstacles sur la route. Heureusement, le jeu ne se résume pas à cliquer comme un furieux sur la machine temporelle. Il arrive que celle-ci soit déchargée ou inutilisable, ce qui oblige à trouver une source de lumière pour la recharger ou à envisager d’autres façons de progresser. Le voyage dans le temps est un élément de gameplay important, mais tout ne tourne pas autour de ça, heureusement. Car le jeu vaut avant tout pour la qualité de son histoire.
Étant divisé en plusieurs courts épisodes qui laissent chacun accès à un nombre restreint d’objets et de lieux disponibles, The Silent Age ne présente pas de difficulté majeure. Comme dans tout point’n click, la seule chose qui pourra vous faire piquer une crise sévère est d’avoir raté un élément interactif sur un écran, même après être passé dix fois à côté. Le scénario, d’abord classique quoique prenant, ne cesse de s’étoffer au fil des chapitres, jusqu’à une conclusion absolument excellente dont je n’aurai pas la bêtise de vous dire ici quoi que ce soit.
Ambiance survivaliste dans la maison du scientifique, seul survivant à l’apocalypse (avec Joe).