Test : Forestrike - PC

Forestrike - PC

Forestrike - PC

Genre : Roguelite

Partager
Forestrike, c’est un roguelite mêlant arts martiaux, pixel art très stylé et une idée centrale assez brillante : pouvoir « prévisualiser » chaque combat avant de le jouer pour de bon. Sur le papier, c’est génial. En pratique, on est face à un très bon jeu, mais aussi à une expérience parfois épuisante.

Test effectué à partir d'une version PC

On incarne Yu, disciple encore un peu frais, chargé de traverser le pays pour libérer l’Empereur de l’influence d’un amiral un peu trop maléfique pour être honnête. Le tout est présenté comme un hommage assumé au cinéma d’arts martiaux, avec combats éclairs, poses bien senties et galeries d’adversaires à dérouiller en quelques coups propres. La particularité de Forestrike, c’est la fameuse capacité de « Foresight » (Préméditation) : avant un combat, tu peux entrer dans une sorte de simulation où tu t’entraînes autant que tu veux. Tu testes des enchaînements, tu regardes qui attaque quand, tu optimises l’ordre des coups… puis, quand tu te sens prêt, tu lances le vrai affrontement, cette fois avec la mort potentielle de ta run à la clé. Ce système transforme chaque rencontre en puzzle en temps réel. Les combats durent quelques secondes, mais ils demandent une planification millimétrée : placement, priorités de cibles, gestion des coups lents mais puissants ou des attaques plus rapides, utilisation d’armes ramassées au vol… Tout est pensé pour que tu construises une chorégraphie parfaite, puis que tu la récites sans bégayer quand la pression monte.


Forestrike fonctionne en runs, façon roguelite classique. À chaque tentative, tu choisis un maître d’arts martiaux qui définit ton style de base, puis tu débloques au fil des combats de nouvelles techniques, des bonus passifs ou des modifications de moveset. Certaines approches misent sur les contres, d’autres sur le zoning, d’autres encore sur des coups plus risqués mais très rémunérateurs si tu ne te rates pas. On sent clairement la patte du studio : le jeu pousse à apprendre son langage visuel. Les signaux d’attaque, les animations d’ennemis, les timings de parade ou d’esquive : tout est fait pour que la répétition ne soit pas totalement vaine. Forestrike veut que tu mémorises, que tu corriges ton plan, que tu atteignes ce moment où tout s’aligne et où Yu traverse un écran entier sans se faire toucher, comme dans un vieux film de kung-fu rembobiné dans le bon sens.

Forestrike

Visuellement, le jeu opte pour un pixel art abstrait, très épuré, mais bourré de petites trouvailles : silhouettes contrastées, effets de percussion lisibles, arrière-plans stylisés plus que détaillés. Ce n’est jamais tape-à-l’œil, mais l’animation est nette, les impacts sont lisibles et les combats restent très clairs malgré l’agitation. Côté ambiance, la bande-son calme entre les combats contraste avec les claques sonores des coups réussis. On n’est pas dans le grand spectacle orchestral, mais dans quelque chose de plus resserré : quelques motifs musicaux qui reviennent, une certaine retenue sonore qui colle bien au ton presque méditatif des phases de préparation.

Forestrike

Quand le kung-fu devient casse-tête chinois

Si Forestrike ne se tenait qu’à ça, on aurait déjà pu repartir satisfait de notre expérience avec lui. Le problème, c’est que son idée centrale est aussi ce qui finit par lui scier un peu les jambes. La Préméditation enlève une partie du risque immédiat. Pouvoir s’entraîner autant qu’on veut avant de tenter un combat réel, c’est grisant, mais ça retire un peu cette tension viscérale qui fait justement le sel des roguelites les plus brutaux. Tu sais déjà comment ça va se passer, tu as ajusté ton plan ; le moment où tu « joues pour de vrai » devient parfois une simple formalité, une exécution de ce que tu as déjà répété dix fois. Paradoxalement, cette même mécanique peut aussi rendre le jeu frustrant. Quand tu passes dix, quinze, vingt essais dans la simulation à essayer tous les enchaînements possibles et que tu n’arrives toujours pas à une solution satisfaisante, tu commences à te demander si le combat est vraiment jouable avec ta configuration actuelle. C’est là qu’apparaît une sensation assez désagréable : celle d’un puzzle mal posé, où il manque une pièce.

Forestrike

La difficulté, elle, ne plaisante pas. Forestrike s’adresse clairement aux joueurs qui aiment les jeux à exécution lourde, ceux où une erreur se paye immédiatement et où tu passes autant de temps à t’entraîner qu’à « jouer pour de vrai ». Les runs alternent entre des moments jubilatoires où tout s’enchaîne à la perfection et des murs totalement opaques, où tu te fais ratatiner en boucle. On sent que l’équilibrage n’est pas toujours au point. Certains stages donnent une impression de pic de difficulté mal placée, avec des combinaisons d’ennemis et de capacités qui laissent très peu de marge d’erreur, voire aucune si tu n’as pas tiré les bonnes techniques plus tôt dans la run. Les amateurs de roguelites très exigeants y verront un défi motivant ; les autres risquent surtout de lever les yeux au ciel et d’aller faire autre chose. La progression roguelite, elle aussi, montre ses limites. Les nouvelles techniques et perks changent réellement la manière d’aborder les combats, mais la structure générale reste assez répétitive : même type d’arènes, même logique de rencontres, même façon de construire ses runs. On retrouve vite un sentiment de routine, malgré la variété des approches possibles.

Forestrike

Autre point qui tire le jeu vers le milieu du tableau : l’écriture. Forestrike est étonnamment bavard pour un roguelite. Les dialogues sont corrects, avec quelques moments touchants, mais l’ensemble peine à accrocher vraiment. On a souvent l’impression que le jeu essaie très fort d’installer une dimension introspective, sans parvenir à lui donner une vraie profondeur. L’avantage, c’est que tout se zappe facilement ; l’inconvénient, c’est que l’histoire finit par ressembler à un bruit de fond.

Forestrike

Techniquement, rien de dramatique à signaler, mais quelques petites aspérités existent : lisibilité parfois limite dans les situations les plus chargées, fenêtre d’entrée très serrée pour certains inputs, et une courbe d’apprentissage qui ne pardonne pas aux joueurs manette en mains moins précis. Forestrike ne cherche jamais à être un jeu « grand public » ; il assume son côté niche, presque pédagogique, en misant sur la répétition et la discipline.

Forestrike

Enfin, il y a la question du contexte : le jeu débarque dans un océan de roguelites, où beaucoup misent sur la générosité de contenu, les métas complexes et les arbres de progression qui débordent. Forestrike, lui, est plus ramassé, vendu à un prix modeste, et vise une satisfaction plus intime : le plaisir de réussir une séquence parfaite après l’avoir poncée pendant un bon moment. Ce choix assumé a un prix : certains auront vite l’impression d’avoir « fait le tour », malgré la maîtrise encore à acquérir.

Forestrike

Au final, Forestrike est un roguelite de niche, mais solide, qui repose sur une idée brillante : pratiquer les combats avant de s’y engager vraiment. Quand la formule fonctionne, le jeu offre des sensations incroyablement satisfaisantes, proches d’un film de kung-fu où tu contrôlerais enfin le montage. Quand elle se retourne contre lui, elle met surtout en lumière les limites de son équilibrage, de sa variété et de son écriture. Si tu as la patience d’apprendre, de répéter, et que tu aimes transformer un système exigeant en chorégraphie parfaitement maîtrisée, Forestrike a de grandes chances de te parler. Si tu cherches un roguelite plus spontané, plus généreux en renouvellement ou plus accessible, tu risques plutôt de te sentir comme Yu au début de sa formation : un peu perdu, et souvent par terre.
27 novembre 2025 à 14h40

Par

Points positifs

  • Idée centrale brillante de Préméditation / Foresight
  • Sensations de combat ultra satisfaisantes quand tout s’aligne
  • Pixel art stylisé, lisible et élégant
  • Construction des runs intéressante grâce aux maîtres, techniques et perks
  • Langage visuel maîtrisé : animations, signaux d’attaque, timings…
  • Bande-son discrète mais cohérente, qui renforce le côté quasi méditatif de la préparation

Points négatifs

  • La Préméditation rogne une partie de la tension et peut transformer certains combats en simple exécution de ce qu'on a déjà répété dix fois
  • Sensation de puzzle « mal posé » quand tu testes des dizaines de solutions sans jamais trouver d’issue satisfaisante
  • Équilibrage inégal, avec des pics de difficulté brutaux
  • Structure des runs qui finit par devenir répétitive
  • Écriture bavarde mais peu marquante
  • Lisibilité parfois limite dans les situations les plus chargées

Gribouillé par...

Lorris

Lorris

Fin limier du mot

Jean-Claude Van Damme au corps, Jean-Claude Dusse dans la tête. C'est parfois l'inverse.

Twitter : @Yolorris

Revenir en haut