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Avec BALL x PIT, le studio derrière ce projet incandescent prouve qu’il est encore possible de faire du neuf avec une mécanique vieille de quarante ans. Ici, la nostalgie d’Arkanoid rencontre la frénésie d’un roguelite moderne, dans un déluge de particules, de réflexes et de stratégie.
Test effectué à partir d'une version PC
Il ne faut que quelques minutes pour comprendre que BALL x PIT n’est pas un simple jeu d’arcade nostalgique. Le titre mélange l’énergie brute des bornes des années 80 avec la profondeur méthodique d’un roguelite moderne. Une main sur la souris, l’autre sur l’instinct, on se laisse vite happer par ce cocktail explosif où l’adresse rencontre la stratégie. Chaque rebond est une promesse de chaos organisé, chaque partie un pas de plus vers la maîtrise d’un système qui ne pardonne rien mais récompense tout. L’idée de départ est à la fois limpide et géniale. Dans un monde effondré, celui de Baboulone (vous l'avez ?), le joueur plonge dans une fosse sans fond pour en découdre avec des vagues de créatures étranges, tout en détruisant les blocs qui obstruent sa progression. C’est un Arkanoid post-apocalyptique, un casse-brique où la balle ne se contente plus de rebondir sur des briques statiques : elle taille dans le monstre, explose les structures, et transforme chaque arène en feu d’artifice chaotique.
Les premières minutes s’apparentent à un état de transe. On lance une béboule, elle ricoche, éclate, rebondit, et la dopamine monte. Ce rythme effréné est soutenu par une direction artistique audacieuse, toute en aplats de couleurs vives et en effets de lumières bien dosés. Les décors mêlent ruines antiques et éléments technologiques, comme si un temple babylonien avait fusionné avec un tableau d’arcade néon. Mais BALL x PIT ne se résume pas à une descente sans fin. Une fois votre expédition terminée, vous remontez à la surface pour rebâtir Baboulone. Cette boucle de jeu entre l’exploration souterraine et la reconstruction terrestre donne toute sa saveur à l’expérience. En haut, on construit des bâtiments, on recrute des héros, on améliore son arsenal. En bas, on teste le résultat de nos investissements.
Là où beaucoup de roguelites se contentent d’une progression abstraite ou d’un arbre de talents standard, celui-ci donne un vrai sentiment de croissance tangible. On ne se contente pas d’accumuler des bonus : on bâtit une cité entière, pierre après pierre, jusqu’à voir la civilisation renaître au-dessus du gouffre. La gestion de la base n’est jamais une contrainte, elle prolonge naturellement l’envie de relancer une partie. Le petit clin d’œil du jeu est que la reconstruction de Baboulone se fait bâtiment par bâtiment que vous devrez placer par vous-même sur une surface extensible. Vous enverrez ensuite vos soldats, comme des béboules, se heurter aux différents bâtiments et permettre leur construction tout en marchant sur les différents champs de récoltes et vous rapporter des ressources. Une Inception de casse-briques, en quelque sorte.
Chaque run rapporte des ressources différentes, parfois rares, parfois inattendues, et chacune trouve son utilité. Plus de soixante types de boules peuvent être débloquées, combinées et fusionnées, offrant une variété qui empêche la lassitude de s’installer trop vite. Dès les premières heures, on découvre que le jeu n’a rien d’un simple défouloir : il exige de penser à long terme, d’anticiper les prochaines constructions, d’expérimenter sans cesse.
Quand la physique devient philosophie
La mécanique de fusion des boules est le cœur battant du système. Chaque type de boule possède ses propres effets : certaines gèlent les ennemis, d’autres les empoisonnent, d’autres encore se divisent en projectiles secondaires ou se transforment en lasers. Le joueur est encouragé à fusionner ces effets pour créer des synergies imprévisibles. Une boule de feu combinée à une boule de vent ? Résultat : une tornade incandescente qui rase tout sur son passage. Une boule de glace mêlée à une à fragmentation ? Une pluie de givre mortelle qui fait le ménage en un instant. Ce mécanisme d’expérimentation permanente donne au jeu un goût de laboratoire ludique. On se surprend à réfléchir entre deux runs, à se dire : « Et si je tentais un build 100 % électrique ? » ou « Et si j’investissais tout dans les boules explosives ? ».
Le plaisir vient autant de la découverte que de la maîtrise. Le système, en apparence chaotique, cache en réalité une logique interne : chaque boule, chaque amélioration, chaque bâtiment influence la partie suivante d’une façon subtile. L’aspect construction n’est pas qu’un à-côté : il donne de la cohérence à cette folie. Les bâtiments débloqués renforcent la synergie entre les boules, améliorent les héros ou débloquent des modificateurs de gameplay. Le tout repose sur une économie interne très bien calibrée : on ne se sent jamais contraint, mais toujours incité à rejouer pour débloquer « juste un dernier bâtiment ».
Visuellement, BALL x PIT exploite parfaitement le contraste entre la clarté de la surface et le chaos des profondeurs. Les arènes sont saturées de couleurs, d’effets de particules et de réflexions, mais la lisibilité reste globalement bonne. La fluidité des animations, l’éclat des impacts et la sensation de vitesse créent un plaisir sensoriel immédiat. Le jeu est bruyant, lumineux, parfois presque trop, mais il sait doser sa surenchère pour ne pas devenir épuisant. Sur le plan sonore, c’est une avalanche. Chaque rebond claque, chaque explosion pulse dans le casque, la bande-son électronique s’emballe au rythme des combos, et les effets sonores participent activement à la satisfaction du joueur. Tout est pensé pour entretenir un état de concentration euphorique, où l’on perd la notion du temps. Le travail effectué sur la physique des projectiles mérite une mention particulière. Les rebonds sont calculés avec précision, les collisions paraissent naturelles, et le moteur de jeu retranscrit la densité des impacts avec une justesse impressionnante. Cette maîtrise technique confère à BALL x PIT une fluidité excellente et agréable à jouer.
Boing boing boing
Malgré tout, la perfection n’est pas de ce monde. Le principal défaut du jeu apparaît après une vingtaine d’heures : la répétitivité. L’idée de base, aussi brillante soit-elle, reste inchangée. On lance, on rebondit, on progresse, puis on recommence. Les arènes varient, les ennemis se diversifient, mais le schéma global évolue peu. La progression finit par donner l’impression de ralentir artificiellement. Certains paliers exigent une quantité de ressources disproportionnée, ce qui casse un peu le rythme naturel de l’aventure. Le sentiment d’avancer se dilue, et l’envie de relancer une partie s’accompagne d’une légère fatigue.
L’équilibrage entre les héros laisse aussi à désirer. Certains se révèlent d’une efficacité redoutable, d’autres semblent anecdotiques. Leurs compétences modifient certes le gameplay, mais pas toujours de manière équitable. On sent que le système, aussi riche soit-il, gagnerait à être davantage peaufiné pour maintenir l’intérêt à long terme. De même, si la débauche visuelle fait partie du charme du jeu, elle devient parfois contre-productive. Quand trop d’effets s’accumulent à l’écran, il devient difficile de distinguer ce qui se passe réellement. On tire un peu à l’aveugle, on subit les impacts plus qu’on ne les contrôle. Cela ne gâche pas le plaisir global, mais provoque parfois un léger vertige.
Sur le long terme, le manque de variété structurelle finit par se faire sentir. Le jeu repose sur une boucle de gameplay extrêmement solide, mais qui ne se renouvelle pas assez. Le fun immédiat est indéniable, la première dizaine d’heures est même grisante, mais l’élan s’essouffle progressivement. On sent que le concept, pourtant brillant, mériterait une extension, un nouveau mode ou une mécanique supplémentaire pour franchir un cap. Et pourtant, difficile de ne pas y revenir. Car BALL x PIT parvient malgré tout à conserver cette étincelle que beaucoup de roguelites perdent trop vite : un plaisir pur, immédiat, presque enfantin. Même lorsque l’on connaît les limites du système, le simple fait de renvoyer une boule dans une nuée d’ennemis suffit à redonner le sourire.
BALL x PIT réussit un pari étonnant : ressusciter l’esprit du casse-brique tout en le réinventant sous la forme d’un roguelite nerveux et stylisé. Le mélange fonctionne, porté par une direction artistique éclatante, un gameplay précis et un système de progression diablement efficace. Ses mécaniques de fusion et de construction confèrent une vraie profondeur, et son sens du rythme en fait un jeu aussi gratifiant qu’addictif.
Certes, la répétitivité finit par poindre et l’équilibrage demande quelques ajustements, mais ces défauts n’entament pas la réussite globale. Le jeu s’impose comme une excellente surprise : pas tout à fait un chef-d’œuvre, mais une œuvre solide, généreuse et pleine d’idées. Pour ceux qui aiment les rebonds frénétiques et les expériences qui oscillent entre chaos et stratégie, c’est un passage obligé.