L’univers mafioso m’a toujours fasciné. Ce mot est à considérer au sens littéral bien sûr, n’oublions pas que ce sont des gangsters. Mais leurs valeurs sont très fortes : puissance, honneur, loyauté. De plus, un sens aigu des traditions familiales sont à mettre à l’actif leur actif ; tout comme leurs nombreux assassinats. Al Capone, Salvatore Riina, ceux-là ont fini soit en prison, soit à la morgue et pour de bonnes raisons. Mais le gang originaire de Sicile est le plus répandu dans le monde : mafie russe, chinoise (Triades), japonaise (Yakusas), américaine. Plusieurs films rendent ainsi « hommage » à ces mafiosi : ceux sérieux avec les Affranchis, le Parrain (avec cet inévitable Don Corleone) ou ceux à tendance comique (Mafia Blues). Mais le jeu vidéo sur consoles tarde toujours à trouver une alternative au cinéma.
"Tou é dé notres mon ami"
Le jeu ne nous place pas dans la peau d’un mafioso reconnu par les siens, mais dans celle d’un simple citoyen de Chicago (la ville de la prohibition des années 30) contacté par « la famiglia », ou plus précisément par « il Don ». Son nom ? Tommy Angelo (on reconnaît tout de suite la consonance sicilienne), taxi-driver qui souhaiterait booster sa vie et la rendre plus « piquante ». Après avoir été engagé, il faut prouver au chef suprême qu’il a bien fait. Pour cela, les missions résolvent notre cas ; elles vont bien entendu crescendo. On commence par les petits jobs : aller chercher de l’argent, transporter un cadavre et autres. En gagnant la confiance du parrain, on se voit institué de tâches plus périlleuses : règlements de comptes à coups de mitraillette, assassinat, vendetta, courses-poursuites etc. L’emploi du temps d’un criminel est chargé ! Mais gare aux flics, moins indulgents que ceux de GTA car ils sanctionnent par des amendes les différents irrespects du code de la route (grillage de feux, excès de vitesse) et les outrages (vol, port d’armes et compagnie).
Les missions de Mafia sont plus directives que celles de GTA. On ne remplit plus les objectifs selon ses propres moyens. Il n’y a souvent qu’une seule solution à prendre, et l’ensemble est assez scripté. Le tout aurait pu être un défaut si le milieu ambiant n’était pas si entraînant. Qu’est-ce qui rend l’ambiance si magique ? Il y a tout d’abord les couleurs ; celles-ci sont assez froides, et entraînent indubitablement une ambiance oppressante, avec le sentiment de frôler la mort à chaque coin de rue. Cela injecte un sentiment d’harcèlement, de crainte. C’est en quelque sorte tout le contraire de GTA : Vice City qui privilégie une ambiance sea, sex & sun et des couleurs chaudes. Le ton glaçant colle à l’esprit de Mafia, c’est-à-dire l’univers noirâtre et sombre de la prohibition de l’Illinois.La deuxième chose qui contribue à rendre l’atmosphère si prenante est la bande-son. Les voix françaises sont tout à fait à leur honneur, et c’est un pur régal d’entendre les paroles des mafiosi avec un son français, avec la voix rocailleuse, grave et forcée, grand stéréotype du cinéma mondial. Les musiques, dans un style classiques, nous plongent encore plus profondément dans la classe et l’ambiance caractéristiques de la mafia italo-américaine. Enfin, les cinématiques sont dignes des meilleures productions cinématographiques. Utilisant un moteur différent du jeu (heureusement d’ailleurs, mais j’y reviendrai ultérieurement), elles accouplent couleurs sombres et sons : le mélange qui fait un malheur ! Le scénario est très prenant et les cut-scènes demeurent une très belle alternative entre plaisir de jeu et découverte de la trame.

Une classe qui ne déteint pas sur la réalisation
Misant sur un environnement charmeur et qui donne envie de poursuivre l’aventure à son terme, les p’tits gars d’Illusions Softworks ont négligé la robe graphique. Les graphismes en soi ne sont pas très laids, puisque le niveau de détail est assez honorable (surtout pour les voitures), et les décors intérieurs sont assez beaux, mais le gros du souci vient du moteur graphique qui est particulièrement laborieux. Les immeubles jouxtant les routes révèlent une résolution plus basse que terre. Aussi, problème récurrent dans Driver 2, les bâtiments disparaissent et le champ de vision en devient que plus réduit. Quand les constructions ne se subsistent pas en « néant total » pour réapparaître après, c’est grâce (ou à cause) du clipping qui fait surgir un épais brouillard, comme pour dissimuler sous un rideau les défauts graphiques dus soit au bâclage, soit aux trop grosses ambitions (peu probable ici). Au fait, le frame rate est proche du zéro. Enfin, on note le manque de vie dans la ville (je sais qu’il y a des meurtres mais quand même !) puisque beaucoup de passants ont été supprimés. Au cas où vous ne l’auriez pas compris, les graphismes sont à mettre aux oubliettes pour longtemps.

Un gameplay fastidieux
Le principal problème de la jouabilité provient de son inégalité. D’un côté, les voitures ne sont pas très difficiles à manœuvrer (la vitesse peu élevée y est pour beaucoup), mais de l’autre, Tommy est incroyablement coriace ! Entre sa lenteur, sa raideur et son imprécision, on est gâté ! Les gunfights censés apporter du zèle au jeu sont un meeting de bugs de collisions, de problèmes de caméra (en intérieur) et de manque de rigueur dans la visée. On voit mal nos ennemis avec la caméra, quand on les voit, on les rate, mais quand on vise bien, on les touche pas car ce sont les murs qui absorbent les balles. À ce propos, les armes sont relativement non exhaustives, entre le flingue, le fusil à pompe, le Thompson, la sulfateuse et autres. Bon, sachant qu’une grande partie de Mafia requiert une voiture, la rage causée par la marche à pied n’est qu’occasionnelle…et longue ! Au fait, je ne préfère même pas évoquer les temps de chargements nombreux et briseurs d’action, et dont la longueur m’a permis de lire un bouquin de Stendhal, c’est dire.
