Dragon Quest : l’Odyssée du Roi Maudit vous met dans la peau d’un héros qui à l’instar de Link ne possède pas de nom prédéfini et ne prononcera pas un traître mot de toute l’aventure. Escortant la caravane du roi Trode et de sa fille, changés respectivement en monstre vert ridicule et en jument, vous êtes à la poursuite de l’infâme Dhoulmagus, responsable de la fâcheuse métamorphose du roi. Ce point de départ sera bien sûr le commencement d’une longue poursuite, émaillée de rencontres et de coups de théâtre, qui vous rappellera même par moment la traque d’un certain Sephiroth... Plusieurs personnages se joindront à vous, chacun doté de son histoire et de ses motivations qui lui sont propres ; ainsi Yangus, malfrat obèse bourru mais plutôt coeur d'artichaut, Jessica, jeune fille fougueuse issue d'une famille noble, et enfin Angelo, séducteur intrépide et bohème, font certes un peu clichés de jeu de rôle, mais rattrapent tout par leur présence et leur design fabuleux. Vous devrez bien sûr parcourir en leur compagnie la carte en long en large et en travers avant de mettre un terme à votre quête. Somme toute classique, le scénario utilise néanmoins des éléments qui ont fait leurs preuves, le côté conte de fées étant habilement contrebalancé par un humour omniprésent, et les créateurs distillent un second degré latent, chose finalement assez rare en RPG.

Du classique !
Côté gameplay, on se retrouve là aussi devant un système plutôt basique, mais qui a l’avantage d’être très rapidement assimilable. Les combats (aléatoires !) se déroulent au tour par tour, chaque personnage possédant et apprenant ses propres capacités, en répartissant par catégorie des points de compétence à chaque passage de niveau. La principale originalité des combats dans la série
Dragon Quest est qu’ils se déroulent la plupart du temps à la première personne, les ennemis vous faisant face en ligne. Ce côté un peu figé des combats a cependant été bien contourné ici, et une fois les actions décidées, le combat (et la caméra avec) s’anime comme dans tout RPG, jusqu’au prochain choix d’actions. L’exploration, quant à elle, se déroule selon le schéma habituel carte du monde/village/donjon, les sauvegardes ne s’effectuant que dans les églises des villages, sous forme de « confession ». Passé un certain stade de l’aventure, des formes de transport rapides vous seront proposées (le tigre étant l’une des plus sympathiques). Malgré tout ce classicisme, n’allez pas croire que jouer sera une promenade de santé : la difficulté a été dosée avec une minutie maniaque, il vous faudra parfois vous y reprendre à deux fois face à tel ou tel boss, et l’exploration totale des donjons, comme de la carte, n’est pas mince affaire, tant le jeu regorge de passages, de détours et de coffres soigneusement cachés.

De la nouveauté !
A ce point du test, vous devez vous demander ce qui justifie l’intérêt d’acheter un produit qui, décrit comme ça, ne semble pas se démarquer d’un banal Tales of. C’est que la force du jeu ne réside ni dans son scénario, ni dans son gameplay, mais dans son atmosphère. D’une, les p’tits gars de
Level 5 n’ont pas chômé : le monde de
DQVIII est tout simplement immense, verdoyant, vallonné, le jour et la nuit s’y succèdent dans une progression chromatique à rendre d’humeur pastorale n’importe quel banlieusard du 9-3. De deux, la patte graphique d’Akira Toriyama (cultissime créateur de
Dragon Ball, présent depuis les débuts sur
Dragon Quest) est pour beaucoup dans la richesse du titre : tous les personnages et tous les monstres rencontrés sont dessinés de la main du maître es manga, ce qui, combiné au cel-shading cher à
Level 5, donne réellement l’impression d’être devant un dessin animé, d’autant plus que les voix des personnages sont particulièrement réussies. Il résulte de ce mélange une ambiance joyeusement débile, les personnages adoptant souvent une attitude complètement grotesque (voir le roi Trode courir du haut de ses 70cm est un régal), et les combats étant pimentés par l’aspect saugrenu de la plupart des monstres (le calamar schizophrène et le « roi-goutte-d’eau », ou King Slime, étant mes favoris). Mais le jeu sait aussi reprendre son sérieux, et les scènes loufoques laissent parfois place à des moments plus émouvants. C’est dans ces instants qu’on remercie
Square-Enix d’avoir fait intégralement réenregistrer les musiques du jeu par l’orchestre symphonique de Tokyo ; en effet les compositions sont extrêmement riches et collent parfaitement à l’ambiance du jeu, la musique de la carte du monde évoquant à elle toute seule le voyage, la liberté, le vent sauvage, peace and love, quoi.
Des bonus !
On pourrait aussi parler pendant des heures des nombreuses petites cerises sur le gâteau qui émaillent l'aventure et rallongent la durée de vie déjà monumentale du titre. L'alchimarmite, par exemple, permet de fusionner deux objets pour en obtenir un troisième (le système avait déjà été exploité dans
Dark Chronicles), et la quête pour obtenir toutes les recettes possibles disséminées à travers les bibliothèques du monde peut s'avérer très prenante, d'autant que certaines recettes sont incomplètes, et nécessiteront toutes vos compétences de déduction et de logique. On peut également sous certaines conditions capturer des créatures célèbres, et ainsi former une équipe de monstres qui combattront dans une arène prévue à cet effet. Enfin, participer aux jeux du casino rappelera aux plus nostalgiques d'entre vous les heures passées au Gold Saucer... Bref, une exploration intense du jeu vous conduira facilement à plus de 100 heures de jeu, ce qui est suffisament rare dans les RPG actuels pour être souligné. Ceci imbriqué dans cela devrait finir de vous convaincre qu'avec
Dragon Quest : l'Odyssée du Roi Maudit vos 60 Euros ne seront définitivement pas gaspillés.