Test Agatha Christie - Mort sur le Nil

Microids poursuit ses adaptations vidéoludiques dédiées à l'un des détectives de la littérature les plus appréciés : Hercule Poirot. Après le Crime de l'Orient-Express, c'est au bouquin Mort sur le Nil que les développeurs se sont attaqués.

Test effectué à partir d'une version PS5

Et comme pour l'épisode précédent, les développeurs ont décidé d'enrichir l'histoire de base en y apportant un second personnage jouable. Poirot se retrouve donc aux côtés de Jane Royce, une autre détective, tous deux se rencontrant dans les années 70 dans une boîte de nuit où une petite enquête sert de tutoriel : il faut retrouver une bague de fiançailles perdue. Le joueur fait donc connaissance avec les bases du gameplay, à savoir discuter avec des personnages importants, fouiller des endroits précis ou encore utiliser les petites cellules grises pour faire des connexion mentales entre différentes choses.

On ne va pas se mentir, ce dernier élément ressemble énormément au palais mental de Sherlock Holmes, ce qui n'est toutefois pas bien grave puisque le tout fonctionne très bien. Il faut donc mettre en relation des indices ou encore des découvertes pour faire progresser l'enquête et parvenir à la solution, ce qui se fait de manière très naturelle puisque le cheminement se montre toujours très logique. Mais ce n'est que la partie émergée de l'iceberg, cette version de Mort sur le Nil renfermant un gameplay particulièrement varié.

En plus donc des interrogations et du palais mental, il est possible de recréer une timeline en plaçant la bonne action au bon moment, faisant là encore progresser le cheminement de pensée du détective. De petits puzzles sont fréquemment à résoudre, par exemple trouver un code ou reproduire une séquence de sons, des profils de personnages sont à remplir, des conversations sont à écouter en trouvant l'emplacement parfait, des mini-jeux sont disponibles (façon Tetris, bonneteau, Mah-jong...), des confrontations avec des témoins qui mentent sont à mener et ainsi de suite. Sans oublier la collecte dans chaque niveau des moustaches dorées, même s'il s'agit de quelque chose de totalement optionnel.

Nil un nil autre

Tous ces éléments permettent de ne jamais tomber dans la routine puisqu'il y a toujours un petit quelque chose de différent à faire. Sur le long terme, on pourrait croire que l'ensemble forme une entité décousue, mais ce n'est pas le cas puisque chaque nouvel élément est justifié durant l'aventure – mais nous y reviendrons plus tard. Les développeurs avaient-ils peur que les joueurs s'ennuient avec simplement une enquête, ou craignaient-ils que leur bébé soit taxé de répétitif ? Difficile à dire, mais en tout cas cela permet à Mort sur le Nil de rester frais tout du long.

Bien sûr, l'intérêt d'un jeu d'enquête repose avant tout sur son histoire. Et ici, il y a plutôt deux histoires en parallèle : celle de Poirot et celle de Jane, qui se séparent une fois le tutoriel terminé. Le détective part rapidement en direction de l’Égypte pour embarquer à bord du bateau où se passe l'histoire bien connue des fans d'Agatha Christie, tandis que Jane retrouve une connaissance qui va se faire bien vite abattre, la faute sans doute à l'enquête qu'elle menait sur son ex-employeur. La jeune femme va donc se pencher là-dessus, ce qui va également la conduire en Égypte.

Là encore, Microids a fait du plutôt bon boulot avec deux enquêtes et histoires qui se suivent sans déplaisir, portées par un casting haut en couleur de personnages. De quoi proposer quelque chose d'inédit même pour les plus grands fans du bouquin, le scénario reposant tout de même sur plusieurs éléments nouveaux et autres retournements de situation. Et grâce au point de vue de Jane, le Nil n'est pas le seul gros lieu du jeu puisqu'elle se rend un peu partout dans le monde, notamment du côté des États-Unis et de Majorque.

Sur le papier, donc, tout est fait pour faire de ce Mort sur le Nil un très bon jeu d'enquête, mais ce n'est hélas pas le cas. Il ne s'agit certes pas d'un ratage, mais bien trop de petits défauts viennent perturber l'aventure, rendant le tout globalement moyen. On pense tout d'abord au rythme du scénario, qui renferme bien trop de ventres mous, la faute la plupart du temps à un vrai manque de direction. S'il est appréciable de ne pas être tenu par la main, il n'est pas rare de ne pas savoir quoi faire par la suite, obligeant à tourner en rond et à interagir avec tout et n'importe quoi dans l'espoir de relancer le scénario.

Le pyramide Poirot

Mais revenons un peu sur les puzzles à résoudre. Comme dit précédemment, ces derniers sont toujours justifiés dans le scénario. Prenons par exemple le jukebox qu'il faut allumer pour qu'une femme entende la musique et accepte de discuter avec Poirot. Ok, on comprend l'idée : mais était-il nécessaire d'inclure autant d'étapes différentes ? Trouver une pièce de monnaie, remettre le courant, réparer les embrayages, débloquer les CDs, trouver la bonne chanson... C'est trop long, trop fastidieux et inintéressant. Et on ne revient même pas sur l'aspect ''Professeur Layton'' qui ne convient clairement pas à Hercule Poirot.

Une grosse partie des problèmes de cette aventure repose sur sa réalisation qui est clairement d'un autre temps. On ne reviendra pas sur la direction artistique, qui plaira ou non et que nous ne trouvons pour notre part vraiment pas jolie, mais impossible de qualifier ce jeu de beau. Les personnages sont hyper rigides et n'ont que trop peu d'expressions, certaines textures sont baveuses et, paradoxalement, les décors bourrés de détails manquent franchement de vie. La mise en scène, notamment des cinématiques, n'est pas non-plus à la hauteur. Et on ne parle même pas des doublages français franchement loupés (et à peine passables en anglais) ou des musiques elles aussi peu convaincantes et surtout trop peu nombreuses, donc répétitives.

Les problèmes se ressentent également dans la prise en main, qui fait là encore penser à ce que ce genre de jeu aurait pu proposer il y a des années. Les deux personnages principaux sont hyper lents, ce qui rend les déplacements laborieux, et l'interface aurait mérité un petit coup de polish en plus. Ce test a été effectué sur PS5, et malgré cette machine nous avons tout de même eu droit à des temps de chargement, plus spécifiquement dès que l'on entrait dans un nouveau niveau / chapitre. Certes, ces loadings sont courts, mais c'est toujours agaçant d'y avoir droit alors que les machines récentes sont censées supprimer cet aspect.

Cette adaptation de Mort sur le Nil a quelques bonnes idées, comme la présence de deux détectives et de nouveaux éléments scénaristiques qui permettent même aux plus gros fans d'être surpris, ou encore d'un gameplay varié et jamais ennuyeux. L'enquête fonctionne bien, tout comme le système des petites cellules grises. Malheureusement, de gros problèmes de rythme sont présents tout du long et, surtout, la réalisation vient clairement apporter un coup au jeu : ambiance sonore loupée, graphismes pas bien beaux, temps de chargement présents, déplacements lents ou encore des passages ou puzzles parfois trop longs et incohérents par rapport au personnage de Poirot. Dommage.

23 septembre 2025 à 17h22

Par Shauni