Après une belle année passée dans les « terres sauvages », entre les plantations de coca, les chiens errants et autres gangs de chemises mi-ouvertes, notre ami
Nomad remet le couvert dans son rôle de Ghost gentil (mais qui tue tout le monde quand même) contre les méchants très méchants. Cette fois-ci, ce n’est plus une histoire de « plata o plomo », mais plutôt de
Jace Skell, un brillant chef d’entreprise qui a eu la bonne idée d’acheter et d’armer une petite île isolée,
Auroa, d’en faire une zone technologique 2.0 et d’y programmer une défense armée de drones tueurs. Manque de pot,
Cole Walker (campé par l’acteur
Jon Bernthal aka «
le mec au chien de la conf’ Ubi »), un ex Ghost qui cherche la vengeance, a pris le contrôle des créations de Skell et empêche toute personne de quitter l’île avec sa troupe nommée les « Wolves ».
Le ton est rapidement donné puisque le tutoriel prend place peu de temps après que votre hélicoptère ait été attaqué par une nuée de drones : vous vous retrouvez au sol, très mal en point, à la recherche de vos compagnons alors en l’air avec vous quelques secondes auparavant. Du coup, les petites mécaniques habituelles reviennent à la queue leu leu et on vient rapidement à se dire que ça ressemble quand même beaucoup, trop même, à
Wildlands. On se cache, on marque ses ennemis que l’on abat d’une balle rapide dans la tête avant de se diriger vers le point d’objectif et de prendre connaissance de la situation désastreuse dans laquelle Nomad (vous, le héros) s’est fourré.
Quelque temps plus tard, on se retrouve à Erewhon, une cave cachant une partie de la population locale ainsi que certains Ghosts ayant échappé aux Wolves. À la manière d’un
The Division, ce refuge troglodytique fait office de grand Hub où vous pourrez naviguer entre les différentes activités proposées par le jeu ainsi que la boutique, parce que le « iencli » est toujours prêt à mettre la main à la poche pour un peu plus de cosmétique, t’as vu. Plus sérieusement, vous pourrez naviguer entre le mode Ghost War (le coin PvP du jeu qui propose du 4v4 sur différentes cartes), un coin pour préparer vos Raids avec d’autres joueurs, etc. Ni une, ni deux, on tape la causette avec les PNJ sur place histoire de lancer la quête principale et de pouvoir découvrir cette fameuse île, libre comme l’air.
À l’image de Wildlands, vous pourrez vous déplacer librement sur l’île à la recherche d’indices concernant les quêtes principales et secondaires à accomplir, mais également les armes à récupérer ou les prisonniers à sauver. Ces dernières se trouvent dans des coffres disposés dans différents endroits de la carte, les meilleures armes et accessoires étant cachés au fin fond des plus grosses structures ennemies. Le fait de pouvoir y accéder facilement n’est plus qu’une question de niveau général, mais de niveau d’équipement, comme dans The Division. Ainsi, certains camps et ennemis ne seront dégommables qu’après avoir obtenu une certaine qualité d’équipement. Ça force un peu le grinding dégueulasse, surtout pour ceux qui espéraient pouvoir torcher le jeu en ligne droite sans avoir à se farcir tous les camps de la terre.
Chaque objet trouvé, chaque cible assassinée, le moindre coffre ouvert vous donnera des points d’expérience, ces derniers se transformant en niveau et en points de compétences qu’il faudra placer dans un arbre, pour le coup, assez complet. Après avoir choisi votre « classe », vous évoluerez dans différentes grappes de compétences en décidant desquelles actives ou passives vous serviront le mieux, selon les situations. C’est assez intéressant puisque les capacités actives peuvent être changées à la volée, ce qui apporte un peu de stratégie quand il faudra attaquer certaines forteresses. Car, on ne va pas se le cacher, ce n’est pas l’I.A. ennemie qui devrait vous empêcher d’accomplir votre mission. On est dans le plus pur art Ubisoftien qui convient de vous envoyer des masses de sacs de viande écervelés à la gueule.
Alors qu’on trouvait l’I.A. de
The Division 2 plutôt intéressante, la firme française retombe ici dans ses travers et nous livre un spectacle désolant d’absurdité. Du coup, vider un camp revient à, peu ou prou, toujours faire la même chose : on sort son drone, on détecte les méchants, on avance en tuant tout le monde le plus silencieusement possible, et ce jusqu’au nettoyage complet du point. Ensuite, on ramasse tout ce qui nous intéresse avant de nous diriger vers le prochain point d’intérêt. Entrecoupez tout cela avec des quêtes d’escorte, de fouille, d’assassinat et d’interrogation, le tout sur une carte
IKEA où chaque bâtiment et chaque patrouille est posée là, sans vraie conviction de narration environnementale, et vous obtenez
Breakpoint. On a d’ailleurs là un début de jeu pas super didactique avec des objectifs, des pop-up et des indications qui partent dans tous les sens, une carte criblée de points d’interrogation qui ferait passer celle de
The Witcher 3 pour de la petite pisse. Encore une fois, la patte
Ubisoft est passée par là : un monde ouvert boulimique d’activités sans aucune volonté de faire prendre vie à un ensemble qui, de toute manière, manque de cohérence.
Simulation et carton jaune
On le savait, la volonté des développeurs de Ghost Recon : Breakpoint était d’insuffler une dimension « survie / simulation » à la série (histoire de dire « on veut revenir aux bases, m’voyez »). Si, dans l’idée, l’effort était louable, dans la réalisation on reste très loin du compte. Les différentes petites mécaniques censées accentuer l’effet d’immersion dans cette aventure font l’effet contraire puisqu’entachées par de (grosses) lacunes techniques et des mauvais choix de game design. On pourra par exemple citer le fait de boire qui retape un peu la vigueur (mais sans vraiment être indispensable), l’installation du bivouac de survie, à grands coups de cut-scenes reloues, qui permet la création de repas pas vraiment utiles, et la possibilité de se faire livrer des véhicules à tout moment (wahou, cette survie, on dirait Bear Grylls). On saluera toutefois la possibilité de se coucher et de se camoufler sur le sol, ce qui vous permettra d’éviter les drones et les hélicoptères de reconnaissance. C’est un peu le seul moment où l’on se sent vraiment traqué et que le côté survie ressort. On note donc le désir d’Ubisoft de créer un jeu de niche tout en continuant de capter sa population habituelle de joueur : cela donne un gloubiboulga mal réglé de mécaniques contradictoires soutenu par une technique en grande perte de vitesse.
Moi quand mon personnage est bloqué dans le décor
D’ailleurs, on parlera rapidement du moteur du jeu (
Anvil) qui commence à me sortir par le nez : les personnages trop rigides qui ne sautent pas, ne peuvent pas se coller contre un mur ou développer quelconques mouvements de défense (mis à part la roulade), les véhicules dont la physique est à hurler, des bugs de textures, de sons, de collisions ou encore des cut-scenes dont les animations sont parfois… déroutantes (et on ne parlera pas de la qualité d’écriture, juste mauvaise).