Test : Ghost of Tsushima - PS4

Ghost of Tsushima - PS4
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Attendu comme l'une des grosses exclusivités Sony Playstation de cette année, Ghost of Tsushima est développé par Sucker Punch, le studio à l’origine de la série des Sly Raccoon ou encore Infamous.

Test effectué à partir d'une version PS4

Prenant place sur l’île de Tsushima durant l’année 1274 de l’époque Kamakura, le jeu narre l’histoire de Jin Sakai, le dernier samouraï de son clan alors décimé par la première invasion mongole du Japon. L’introduction du titre met en scène l’arrivée, par bateaux, des armées de Khotun Khan, bien résolu à s’emparer de l’île qui se dresse entre lui et le Japon continental. Utilisant des armes et technologies guerrières alors inconnues des nippons, les armées mongoles tracent facilement leur route, s’emparant des villages, fermes et ressources principales de l’île tout en muselant fermement les guerriers japonais restants en vie. Jin Sakai comprend alors que pour reprendre le dessus sur ces Mongols (bien plus forts sur le papier), il doit mettre de côté la voie de l’honneur et du combat « réglo » alors mis en avant par la tradition des samouraïs. Il va devoir embrasser son côté sombre et maîtriser la méthode du « Ghost » (Fantôme), un style de combat calqué sur celui des ninjas, instaurant la peur dans l’esprit des ennemis, attaquant depuis les ombres lorsqu’ils s’y attendent le moins.

Tsushis, makis et brochettes bœuf-fromage

Ghost of Tsushima est donc un jeu en monde ouvert dans lequel vous pourrez vous déplacer librement. Les développeurs ne le cachent pas et en ont même fait un argument dans la promo : ils se sont clairement inspirés d’un certain Breath of the Wild pour construire l’île et réfléchir à un level design engageant. Si l’idée de base est plutôt louable, l’exécution, elle, l’est moins. En effet, là où Zelda nous donne tous les outils pour faire de l’exploration une dimension centrale, mais néanmoins fun du jeu, Ghost of Tsushima s’arrête en plein milieu de la proposition pour finalement rétropédaler et retomber dans les poncifs qui en auraient néanmoins fait un très bon titre en 2010. En d’autres termes, au lieu de nous donner la possibilité d’escalader n’importe quel obstacle et de nous libérer de tous ces objectifs et autres « ? » sur la carte, Ghost of Tsushima met littéralement les pieds dans le plat pour offrir une expérience en monde ouvert mi-figue, mi-raisin, remplie de camp à vider, lieux à trouver et autres objets à récupérer. De quoi faire sourire le plus coincé des développeurs d’Ubisoft. On se retrouve donc à explorer une île au level design assez vertical par moments, sans avoir la facilité de grimper sur les surfaces. Il y a bien, ici et là, des prises d’escalade prévues par les développeurs, mais il va falloir chercher et les trouver pour s’élever sans forcément utiliser les petits chemins escarpés. C’est parfois laborieux de se déplacer d’un point A à un point B, à dos de cheval, sans avoir à prendre des détours incroyables pour éviter tel ou tel ravin situé sur le chemin.

Ghost of Tsushima

La mécanique du vent est aussi là pour vous guider plus facilement dans vos déplacements : il s’agit de placer un point de repère sur la carte puis, à l’utilisation d’un bouton, de faire virevolter le zeph qui vous indiquera la direction à emprunter. Si cette petite « feature » met en exergue l’excellent boulot réalisé sur les effets de particules et la pression dynamique du vent sur les différents volumes (feuilles dans les arbres, hautes herbes, etc), elle tombe aussi un peu plat puisque pas vraiment utile. On finit toujours par jeter un œil sur cette maudite carte dont le jeu aurait mieux fait de s’affranchir pour mettre en avant leurs idées d’exploration qui, en soi, n’étaient pas mauvaises à la base. Ainsi, au lieu de faire du Breath of the Wild (faire de l’exploration sur la base de ce que l’on aperçoit en jeu), Ghost of Tsushima fait du Assassin’s Creed (surexploitation de la carte), et ce n’est pas vraiment pour servir l’expérience joueur.

Ghost of Tsushima

De ce fait, en plus des objectifs de quêtes principales et annexes clairement et directement indiqués sur votre carte (même si certains nécessitent d’être débloqués via des discussions avec des PNJ), vous découvrirez d’autres points d’intérêts, comme les sites pour composer des haïkus, des terriers à renards, escouades de Mongols à pourfendre, sources d’eau chaude ou encore des tiges de bambous à découper en guise d’entraînement. Chacune de ces découvertes participe à la progression de votre samouraï, représentée par la montée en expérience et en gain de points de niveau, par l’agrandissement de votre barre de vie/détermination ou encore par l’évolution esthétique de certains de vos équipements. La progression dans le jeu se fait donc via le suivi d’une trame principale divisée en plusieurs actes, ponctuée de points pivots dans la narration, apportant son lot de nouveaux équipements, talents et possibilités au fil de l’aventure. C’est très, voire trop, classique, surtout pour les joueurs ayant poncé leur dose de mondes ouverts ces dix dernières années et qui trouveront le temps long lors de certaines phases de jeu. Le rythme et la narration sont également inégaux : alors que certaines quêtes annexes demandent plus ou moins de toujours faire la même chose (enquêter, trouver un camp de Mongols, tuer tout le monde et revenir), les quêtes principales n’ont également pas grand-chose pour elles en termes d’originalité. On retrouve les mécaniques très classiques du genre (s’infiltrer dans un camp, suivre un PNJ, combat frontal, etc), soutenues par un déroulé narratif également très convenu (donc certains segments relèvent du soporifique).

Ghost of Tsushima

Attention aux allergies


Alors que le déplacement et l’exploration de l’île de Tsushima tombent un peu à plat et que la progression reste très classique, on n’aura pas moins aimé parcourir de magnifiques environnements, très immersifs, offrant, par moments, des ambiances dignes des meilleurs films de Kurosawa. La bande-son du jeu remplit parfaitement son rôle et nous transporte dans le Japon féodal en un instant. On sent que l’équipe de développement de chez Sucker Punch a pris le temps de peaufiner les différents biomes, monuments et autres formations naturelles pour faire de Tsushima un petit concentré de toutes les merveilles que peut offrir le pays du soleil levant. Les effets de lumière particulièrement réussis participent à cette sublimation des différents décors et offrent d’exquis panoramas. Le mode photo implémenté dans le jeu est d’ailleurs une vraie réussite et très complet : il permettra à tous les amateurs de ce procédé de vraiment s’éclater et mettre en avant les plus beaux paysages du jeu et quelques-uns de vos duels, ce qui pourra faire oublier l’atroce caméra en jeu et l’absence d’un système de ciblage digne de ce nom.

Ghost of Tsushima

Le système de combat de Ghost of Tsushima est la pierre angulaire au cœur du gameplay. Mis en avant dans les trailers et présentations, c’est ce qui fait le sel du jeu et qui a forgé l’âme de la culture populaire autour d’un Japon féodal montré comme sanglant et brutal. D’ailleurs, tout le monde sait à quoi ressemble un duel de samouraïs dans les fleurs de cerisiers. Si le fait de vouloir mettre en scène ces combats dantesques est un vrai beau challenge, le réussir dans les faits est une autre paire de manches. Dans le développement d’un jeu, le respect de la règle des 3C est indispensable (character, camera, control), et dans Ghost of Tsushima on se rend compte très rapidement que l'on en a perdu un en cours de route. Tout d’abord, le combat ne dispose d’aucun système de ciblage de l’ennemi. C’est un choix fort (et plutôt malheureux) des développeurs qui imposent au joueur de toujours recentrer la caméra derrière Jin pour pouvoir suivre l’action. Lorsque l’on est en duel, le problème ne se pose pas vraiment, mais lorsque l’on est assailli par plusieurs ennemis de tous les côtés, le fait de ne pas pouvoir toujours situer la prochaine attaque est très problématique. C’est gênant, c’est frustrant et pas très ergonomique : on aurait même juste apprécié un bouton pour replacer rapidement la caméra derrière notre héros mais, décidément, Sucker Punch en a décidé autrement.

Ghost of Tsushima

« Telle est ma voie… »

Comme tout jeu d’action/infiltration et en accord avec la voie du Bushido mise de côté par Jin, vous aurez la possibilité de prendre les combats de front ou bien de manière plus discrète. L’attaque directe consiste à entamer le combat par une « confrontation » : vous arrivez, découvert, vers les Mongols afin de provoquer en duel leur meilleur combattant. S’en suit une section de jeu jouant sur votre rapidité où vous devrez attendre le moment adéquat pour vous débarrasser de votre adversaire en un seul coup juste avant que le reste de ses camarades ne vous tombe sur le dos. Comme le système de combat ne propose pas de ciblage, vous vous dirigerez tant bien que mal vers les ennemis que vous voulez attaquer en espérant que peu de coups arrivent dans votre dos. Vous attaquez simplement avec une touche, tout comme vous avez la possibilité de parer les attaques (sauf celles en rouge qu’il faudra esquiver). Si la parade est parfaite, la défense de l’ennemi s’ouvre pour l’exécuter d’un coup de katana. Vous aurez la possibilité d’utiliser des attaques spéciales et de vous soigner via vos points de détermination qui se remplissent lorsque vous réussissez de belles parades ou que vous tuez des ennemis. Ces derniers sont équipés différemment : vous avez les archers, les sabreurs, mais aussi des lanciers, des pyrotechniciens ou encore de grosses brutes équipées de masses ou haches à deux mains. La défense de chaque type d’ennemi est différente et il vous faudra ruser pour la percer efficacement. Pour ce faire, le système de combat vous propose d’adopter différents styles de mouvements selon l’adversaire qui se dresse devant vous. Par exemple, la posture de l’eau sera plus adaptée pour faire voler le bouclier des Mongols qui en sont équipés, tandis que la posture de terre sera plus efficace pour contrer les ennemis au sabre. Si, une fois maîtrisées, toutes les techniques sont grisantes à utiliser, on continuera de pester sur la caméra, tout comme sur les joutes contre plusieurs ennemis en même temps qui n’hésiteront pas à attaquer sans relâche, vous empêchant de parer facilement. Sur ce point, on aurait aimé que Sucker Punch s’inspire davantage des productions Rocksteady (la série des Batman Arkham) ou encore de Monolith Productions (L’Ombre du Mordor).

Ghost of Tsushima

Concernant l’infiltration dans Ghost of Tsushima, elle ne révolutionne pas vraiment le genre. Vous vous déplacez accroupi avec la possibilité de grimper sur certains toits, de vous cacher dans les hautes herbes et d’assassiner les ennemis qui ne vous ont pas remarqué. D’ailleurs, ils sont particulièrement aveugles et l’intelligence artificielle est assez décevante. Ces combats et la possibilité de vous transformer en vrai « Fantôme » seront facilités par la progression de votre samouraï, symbolisée par l’amélioration de vos talents, compétences, armes et armures. Sans trop en dévoiler, le système de progression est encore ici très classique mais relativement complet. Certaines compétences spéciales vous permettront également de choper de l’équipement légendaire, histoire d’épaissir encore un peu le contenu du jeu qu’on jugera plutôt quantitatif que qualitatif. D’ailleurs, une tonne d’objets sont à collectionner (à l’image des fameuses plumes d’Assassin’s Creed) pour ceux qui veulent prolonger encore artificiellement, mais sans réel intérêt, la durée de vie du titre.

Ghost of Tsushima


Quand on veut jouer parmi les « cool kids » du bloc « monde ouvert », il faut avoir les reins sacrément solides. La dernière décennie a été un avènement du genre avec des titres comme The Witcher 3, Breath of the Wild, Red Dead Redemption ou autres Assassin’s Creed qui ont révolutionné la manière d’approcher un monde, ses environnements et les activités qu’il propose au joueur. Dans sa démarche, Ghost of Tsushima ne déborde sur aucune ligne et, pourtant, mériterait de passer un petit quart d’heure au coin. Emprunt d’un classicisme presque lourdingue, le jeu de Sucker Punch ne propose rien d’original, si ce n’est de déambuler sur une île aux paysages somptueux et à la direction artistique impressionnante. Même si on sent une volonté d’approcher la sensation d’exploration d’un Zelda : Breath of the Wild, le « Fantôme » de Tsushima butera bien trop souvent sur des murs impossibles à escalader ou sur des rivières à contourner sans jamais avoir vraiment l’envie d’aller voir ce qui se trouve « là-bas », la faute à un manque d’outils facilitant votre voyage à pied (ou à cheval) et de récompenses assez intéressantes qui motiveraient les déplacements sans but. Pour finir, on blâmera la gestion ignoble de la caméra qui éborgne clairement les combats et une narration linéaire plutôt convenue. Malgré ces écueils, la balade dans ce Japon féodal est respectueuse des codes instaurés par le cinéma de samouraï du siècle dernier et les fans de ce genre de récit pourront y trouver leur compte (même ceux rincés par les mondes ouverts classiques).
14 juillet 2020 à 16h57

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Points positifs

  • L’ambiance de guerre et de désolation durant le Japon féodal
  • Les paysages magnifiques et la profondeur de champ
  • La direction artistique
  • Le doublage en V.O. (japonais) possible
  • Le mode photo
  • Les effets volumétriques/particules/lumières
  • La présence du vent qui magnifie les panoramas
  • La bande-son

Points négatifs

  • La caméra cassée
  • La répétitivité des activités/quêtes (on l’a déjà fait 1000 fois !)
  • Le manque d’outils pour explorer l’île
  • L’utilisation du vent comme boussole qui, hélas, tombe un peu à l’eau
  • La surexploitation de la carte avec ses « ? »
  • L’I.A. des ennemis (souvent aveugle)
  • Le partie infiltration décevante
  • La narration est linéaire et pas franchement intéressante

Gribouillé par...

Lorris

Lorris

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Jean-Claude Van Damme au corps, Jean-Claude Dusse dans la tête. C'est parfois l'inverse.

Twitter : @Yolorris

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