Test : The Witcher - PC

The Witcher - PC

The Witcher - PC

Genre : Action-RPG

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L’œil du très haut crève un orgelet pluvieux. L’augure maussade d’un ciel d’orage verse son poison séreux sur la lande grise où grouillent bandits et démons. La désolation et la putrescence montent de la terre gorgée d’eau. La luzerne et les rouées ont envahi les champs. Devant la galerie des maisons abandonnées, parmi les poules et les oies, des corbeaux enfoncent leur bec avide dans les orbites déjà vides d’un amas de cadavres que dévorent une épaisse nuée de mouches. A l’entrée d’un village, les miliciens que la peste n’a pas encore emportés dressent leur fourche au devant des rôdeurs quêteurs de rixes et des pauvres erres en haillons. Les non-humains, elfes et nains, décrétés parasites et parias, attendent l’imprudent cueilleur de Chélidoine à l’orée des bois. Au sommet de la hampe, le sang des combattants souille l’étendard d’une chevalerie tombée en disgrâce. Partout, la guerre, fossoyeuse de prospérité, a érigé ses épitaphes en ruines. Dans les fanges des sentines où croulent les masures des faubourgs roulent malandrins cuveurs de bière et putains à deux sous. Bienvenu en Temeria, pays de souffrance et de décadence…
Aux origines de The Witcher, il y a d’abord un écrivain polonais, Andrzej Sapkowski. Et la volonté forcenée d’un studio naissant, CD Projekt, d’arracher le monde très codifié des jeux de rôle à ses incontournables poncifs, à son manichéisme vulgaire, aux artifices faussement libertaires de sa linéarité, à sa fastidieuse succession de caveaux et de donjons. De fait, puisqu’inspiré d’une œuvre littéraire, le personnage principal du jeu, Geralt de Rivia, ne vous appartiendra pas complètement. Son affiliation, sa classe, sa personnalité et une partie de ses caractéristiques resteront la propriété de celui qui l’a enfanté. Geralt est un sorceleur, c'est-à-dire un homme dont le code génétique a été modifié, un guerrier mutant, doté de puissantes prédispositions à la magie et dévolu à une unique dignité : éradiquer les monstres de la surface de la terre. Jadis considérés comme les héros d’une humanité en butte contre les forces des ténèbres, les sorceleurs sont aujourd’hui traités comme des engeances maléfiques par la société qu’ils ont naguère servie. Leur noblesse se fond désormais dans la peur qu’inspire aux croquants et aux gueux tout ce qui touche à la magie. Et c’est dans ce monde en pleine déliquescence, ravagé par la corruption, le crime et les maladies, qu’après avoir été laissé pour mort sur quelque épieu à la sortie d’une taverne et avoir disparu conséquemment pendant cinq longues années, que Geralt de Rivia, héros d’une époque lointaine, soudain ressurgit. Amnésique et affaibli, l’ancien sorceleur trouve finalement refuge dans l’imprenable forteresse de Kaer Morhen, domaine des Merigold. C’est là que vous entrez en scène.

Oui, cela pourrait commencer comme ça, d’une manière lourde et lente

Démystifions d’emblée la trompeuse impression que laisse la représentation choisie par le développeur. The Witcher n’est pas un action/RPG. Son évolution en temps réel masque en fait des mécanismes propres aux RPG traditionnels, gérés eux en temps discret. Cette étrange inadéquation entre la représentation des déplacements (la caméra propose une vue rapprochée à la troisième personne) et la résolution par jet des combats rend les premières échauffourées très déroutantes pour le joueur novice. Grisé par une apparente liberté, confondant stratégie et frénésie (un réflexe hérité de Diablo), le joueur est enclin à tenter de décimer les ennemis qui l’entourent par des séries de clics furibards, alors que le jeu, en sous main, répond à ses injonctions par la génération des désormais classiques jets de parade, d’initiative, de sauvegarde, de touche et calcule ainsi le résultat de ses actions. N’oublions pas que The Witcher emprunte à Neverwinter Nights 2, le titre de Bioware, son moteur, l’Aurora Engine… L’effet produit est d’autant plus déconcertant que les développeurs de CD Projekt n’ont pas décidé de réduire la partie temps réel de leur gameplay à un rôle purement cosmétique ; le joueur se voit ainsi offrir la possibilité de « chorégraphier » finement ses coups afin de déclencher des combos dévastateurs. La puissance de ses troupes d’escrimeurs croît pourvu que ces dernières s’enchaînent sans heurt ; mais la moindre coquille dans la rythmique très précise des engagements entraîne un douloureux retour à la force de frappe initiale et expose de surcroît Geralt aux sanglantes ripostes de son adversaire. Ainsi, un duel, qui négocié maladroitement est susceptible de mettre en péril la vie du héros, peut, s’il est convenablement orchestré, s’achever en quelques coups d’épée victorieux. Sans une égratignure. Sur cet étrange agrégat d’éléments disparates se greffe en plus la nécessité de choisir parmi trois styles de combat différents : rapide, puissant ou mêlée, ceci afin de vous adapter aux caractéristiques offensives de vos ennemis. Sans oublier la magie, qui, se superposant à l’escrime, viendra rehausser la saveur tactique des combats ! Le bouton gauche de la souris pour le glaive, le bouton droit pour le déchainement des forces runiques. Et quoi de plus jubilatoire que d’étourdir l’adversaire avant de lui asséner un magistral coup de lame pivotant. Clin d’œil discret aux spectaculaires fatalities de Mortal Kombat. Gageons que les nostalgiques du vénérable Barbarian apprécieront plus particulièrement la séance de décapitation… Aussi déstabilisant qu’il paraisse de prime abord, cet étrange et complexe mélange finit néanmoins par dissiper la surprise et les déconvenues qu’il suscite au départ pour rallier finalement l’adhésion des joueurs persévérants : il est plus dynamique que les systèmes en tour par tour et plus stratégique que les dispositifs en temps réel expérimentés par la concurrence (on pense naturellement à la série The Elder Scrolls). Et après plusieurs heures de jeu, c’est avec un authentique plaisir que l’on manipule la redoutable machine de guerre qu’incarne notre sorceleur…

J’appartiens à une des plus vieilles familles de Wyzima

Ceux qui avaient regretté la médiocrité du scénario et l’invraisemblable dépouillement de la mise en scène d’Oblivion peuvent d’ores et déjà se frotter les mains. Le talent d’Andrzej Sapkowski n’a pas été bafoué. A peine aurez-vous débarqué dans Kaer Morhen que la citadelle sera prise d’assaut par une horde de brigands que vous identifierez plus tard comme appartenant à une vaste organisation criminelle portant le nom de La Salamandre. Durant l’attaque, le laboratoire de Kaer Morhen a été pillé et un homme, Le Professeur, commanditaire supposé du raid, en a profité pour dérober certains des secrets des sorceleurs. Ce sera le point de départ d’une enquête qui vous entraînera dans la région de Wyzima, ville septentrionale de Temeria… Une cité accablée par la peste, gangrénée par la corruption, menacée d’implosion par les haines raciales qui déchirent depuis peu les communautés… Une cité sur laquelle plane l’ombre terroriste d’un groupuscule de rebelles non-humains et où les sorceleurs [pas tout à fait humains, eux non plus], hélas, ne sont guère les bienvenus. Contrairement à nombre de jeux similaires, The Witcher ne vous traînera pas de grottes en donjons à toutes fins de vous faire engranger de l’expérience et de remplir votre sac à dos. Si Geralt aura bien à descendre de temps en temps dans quelques souterrains putrides et à y écorcher quelques goules pustuleuses, les innombrables quêtes qui lui seront soumises, comme il cheminera sur les traces de la Salamandre, ne solliciteront pas toujours ses talents de combattant et les dialogues, par ailleurs excellents [quoique rugueux], tiendront une place prépondérante. Les développeurs ont ici su utiliser le travail accompli par l’auteur pour étoffer la trame politique de leur scénario et Geralt ne se contentera pas de dégainer son glaive comme un vulgaire polisseur de lame. Mener à bien certaines missions réclamera ainsi davantage de délicatesse que de muscle. Qu’il froisse un personnage par son attitude revêche et Geralt se privera peut être d’une information capitale dont l’absence nuira à la bonne conduite de ses futures investigations.

Pensez aux ténèbres et au grand froid, dans cette vallée où résonne la désolation

La force de The Witcher n’est pas, comme on a pu le lire ici ou là, d’oser tisser son scénario sur un épais maillage de thématiques adultes, ni même de faire voler en éclat le solide carcan de manichéisme où étouffent encore trop de jeux de rôle, mais de rapatrier la notion de vérité dans les limites toujours très lâches du point de vue. Dans The Witcher, il est perpétuellement exigé du joueur qu’il assume ses convictions ; la réalité s’élabore par la seule force de sa persuasion. Il est toutefois vrai que l’univers dépeint par le jeu ne fait aucune concession à la political correcteness qui aseptise bon nombre de ses concurrents. On est très loin du monde gai et fleuri d’Oblivion ; on est plus proche de celui sombre et implacable dans lequel se situe la série allemande Gothic. Et en effet, dans les environs de Wyzima, on aime à lever le coude et à trousser les filles au fond des impasses. Geralt n’est d’ailleurs pas apôtre d’abstinence ; l’homme ne rechigne ni à la culbute ni à la picole. Hamadryade ou putain syphilitique, vinasse sulfatée ou cru millésimé du Château Beaucaillou. La chevelure du héros étincelle d’un blanc qui ne coïncide guère avec les savoureuses déviances qu’affectionne le personnage ; des déviances à l’image du monde dans lequel il évolue. Et d’ailleurs, à l’orée des bois, le mal écarquille ses yeux injectés de sang. La nuit, des chiens déchiquettent les maraudeurs imprudents. Des immenses étendues de tourbe qui tapissent les abords de la cité surgissent des noyeurs, créatures reptiles qui happent et dévorent les briquetiers, lesquels travaillent autour des puits d’argile dans la pestilence vaporeuse des marais. A l’entrée des villages, des miliciens corrompus rackettent les paysans démunis et diminués par une économie au bord de l’asphyxie. Lorsque le jour s’estompe, quelques fanatiques se regroupent à la lueur des résinés pour lyncher les nains et les elfes qui vivent en parias dans les bas-fonds de leurs cités. A l’angle des venelles se dressent coupeurs de gorge et cuiseurs de soupe. La peste traîne sa cohorte de cadavres le long des routes [s’il n’y avait ces averses incessantes, on se croirait à Manosque lors de l’épidémie de choléra décrite par Giono au début du Hussard sur le toit]. Entrant dans une taverne [un bouge], vous avez de grandes chances de tomber sur une rixe entre ivrognes ou sur un groupe de malandrins s’apprêtant à violer une fille du quartier. La sauvagerie de ce Moyen-Age croupissant est parfaitement retranscrite et chaque personnage vaque tant bien que mal, soufflant, souffrant et ahanant, aux occupations qui conviennent à son rôle : des gamins en hardes pataugent dans la boue qui jonche les rues, les catins rajustent leurs résilles dans le halot timide des fanaux et sous la nef des églises les infirmières épuisées s’agenouillent au chevet des mourants…

On conviendra aisément qu’il importe de savoir si l’on n’est pas dupe de la morale

Il est également vrai que dans The Witcher, aucune ligne de démarcation claire ne sépare distinctement le bien du mal. Les noirs et les blancs qui imprègnent l’alignement des personnages des jeux de rôle traditionnels se voient ici remplacés par un inanalysable camaïeu de gris. Chaque être abrite un double, un Janus, un homme de rectitude et un homme de compromis. L’ambiguïté morale où s’abîme Temeria balaye toute forme de certitude. Il vous faudra apprendre à douter des apparences et à vous méfier des palabres trop affables. Il conviendra d’ailleurs de faire confiance à vos intuitions. Vous serez bien sûr tenté de compatir avec le chagrin d’un garde dont la jeune fiancée a été assassinée ; avant que vous ne découvriez quelques indices tendant à prouver que la jeune fille, pour avoir été violée par son prétendu fiancé, s’est en fait empoisonnée. Un prêtre dont vous aurez tenté de gagner la confiance s’avérera plus tard mêlé à un ignoble trafic d’enfants. Dans la cabane d’un vieillard dont vous aurez jadis assuré la protection, vous retrouverez un crâne et des tibias humains vous révélant par là-même que le sympathique pèlerin est, en fait, anthropophage. En contrepoint de ces marques de bienveillance déçues, vous aurez l’opportunité de rencontrer Siegfried, un inflexible Chevalier de la Rose Ardente ou tel marchand anonyme qui, par souci d’honnêteté, vous paiera rubis sur l’ongle pour un service que vous lui avez prétendument rendu plusieurs années auparavant ! Les gens de CD Project n’ont donc pas opté pour une radicalisation du mal ; cela eut été comme substituer à la traditionnelle dichotomie simplificatrice des univers Héroïc Fantaisy, un monolithisme plus pauvre encore. Mais insistons sur ce point qui nous semble différencier The Witcher de ses pairs : dans de nombreux cas, aucune vérité indubitable n’affleurera à la surface des faits vérifiables. Les preuves concernant la culpabilité de quelqu’un, souvent congrues au témoignage d’un tiers que rien sauf votre conviction n’accrédite, seront susceptibles d’être remises en question. Et la distance qui séparera vos actions de leurs répercutions rendra les conséquences de vos décisions difficiles à calculer et vous donnera de facto envie d’assumer pleinement votre part de responsabilité. Jamais nous ne nous sommes sentis tentés de reprendre une sauvegarde afin de reconsidérer les alternatives dédaignées. Et aucun mécanisme de coercition n’est jamais venu nous imposer les conclusions auxquelles les développeurs voulaient que nous parvenions.

L’aube surprit Geralt, béat et muet, mais réveillé

Malgré la maturité de sa construction narrative et l’originalité de son système de combat, The Witcher n’en reprend pas moins certain éléments incontournables du jeu de rôle. Geralt, fraîchement revenu d’entre les morts, devra regagner la place qui était la sienne parmi ses congénères sorceleurs. Entendez par là que l’ex-champion des exorcismes musclés réintégrera le monde des vivants sous votre férule comme simple novice et qu’il devra accumuler de l’expérience au fil des quêtes et des affrontements. A chaque changement de niveau, Geralt recevra des talents [bronze, argent ou or] dont il devra se servir afin de modifier son code génétique et ainsi renforcer ses caractéristiques ou acquérir de nouvelles aptitudes offensives ; il existe plus de 200 améliorations possibles pour le sorceleur, réparties entre les quatre attributs principaux (force, endurance, intelligence, dextérité), les cinq signes magiques (Aard, Igni, Quen, Axii, Yirden) et les 3 styles de combats (puissance, rapidité, groupe) pour les glaives d’argent et d’acier. Le classicisme prévaut également au niveau de la gestion de l’inventaire. Il sera bien évidemment question de ramasser du matériel sur la dépouille des ennemis ayant défunté avant l’âge puis d’aller revendre l’excédent de nos bagatelles à des marchands avaricieux. On remarquera toutefois que même dans la reprise des grandes lignes du schéma directeur des RPG, les développeurs ont mis un point d’honneur à soigner le réalisme de leur titre. Ainsi, il sera impossible à Geralt de transporter plusieurs jeux d’armure et seuls trois emplacements accepteront de recevoir les armes blanches. Ceux dont la gourmandise aime à transformer les jeux de rôle en promenade au supermarché crieront sans doute au scandale. Le cabas du sorceleur n’est pas un caddy où l’on jette en vrac lames et boucliers. N’espérez pas davantage pouvoir acquérir mille potions sur le dos ensanglanté de vos victimes. Dans The Witcher l’alchimie est un talent privilégié dont peu de gens ont la maîtrise. La rareté des potions vous obligera donc à les concocter vous-même, glanant parmi la faune et la flore de Temeria les susbtances indispensables à vos décoctions.

Il m’est arrivé aujourd’hui une aventure étrange…

La modélisation de l’impitoyable monde de Temeria mérite quelques éloges. Le travail effectué par CD Projekt sur le moteur fourni par Bioware est vraiment impressionnant. Si la qualité technique de The Witcher ne peut concurrencer celle de Gothic III ou d’Oblivion, la qualité artistique de l’ensemble compense largement la modestie du rendu. Une atmosphère s’élabore aussi sur le soin apporté à la retranscription de certains détails : dans The Witcher, par exemple, la luminosité à l’intérieur des bâtiments varie en fonction de l’heure et du climat. Et les sentines sordides autour desquelles se tassent des masures crasses, hâtivement rafistolées, parviennent à faire partager au joueur un peu de la misère dans laquelle [sur]vivent les habitants de Wyzima… Peu importe que les textures soient assez grossières, que les figures que vous croisiez au gré des chemins et des rues se répètent et que certaines modélisations dénoncent le faible nombre de polygones qu’est capable de manipuler l’Aurora Engine ; la cohérence esthétique de l’ensemble suffit à rendre une troublante impression de mort et de déliquescence. Si les bruitages ne suscitent pas d’admiration particulière, les musiques, elles, quoique moins envoutantes que celles d’Oblivion, servent efficacement l’ambiance qui se dégage de chaque lieu. On notera également la très bonne tenue de la version française. La traduction n’a pas édulcoré la crudité initiale des dialogues et le jeu d’acteur, en dépit de quelques extravagances frauduleuses, renforce efficacement la crédibilité des personnages.

Winnie – (fixant le zénith) Encore une journée divine !

Malgré ses indéniables qualités, The Witcher ne plaira pourtant pas à tout le monde. D’abord parce que la part congrue à la dimension rolesque du titre est assez limitée. Geralt est avant tout un sorceleur ; vous n’aurez donc pas l’opportunité d’en faire un voleur, ou un mage, ou un archer… S’il vous sera bien offert la possibilité de faire évoluer le personnage à votre convenance, cette évolution se verra toujours contingentée par les prédilections très restrictives de cette imposition initiale. Impossible de surclasser l’alignement originel de votre avatar (disons, au mieux, Good Chaotic) ou se subvertir le scénario écrit par le développeur en massacrant, par exemple, vos amis, ou [pourquoi pas ?] les habitants d’un petit village. Gothic III, dont The Witcher s’inspire parfois, incitait le joueur à prendre davantage de liberté avec les suggestions et les obligations de sa trame principale ! De même, comme nous l’avons déjà signalé, le jeu ne propose qu’une quantité restreinte d’objets magiques et d’équipements à collectionner. Ici, notre narcissisme se sent berné. De plus, si l’habileté des artistes de CD Projekt parvient à nous faire accroire à l’immensité du monde de Temeria, l’impossibilité dans laquelle se trouve Geralt d’enjamber une barrière ou de débroussailler une roncière réduit sensiblement la taille des environnements de jeu. A ces restrictions topographiques s’en ajoute une autre : Temeria n’est pas bâtie d’un seul tenant comme Morrowind ou Cyrodiil. Chaque chapitre de l’histoire est hermétiquement associé à un lieu et il vous sera interdit de naviguer à votre guise de chapitre en chapitre. Quand la profondeur scénaristique du jeu engloutit une partie de la liberté que ses intelligents mécanismes affectaient nous octroyer… Finissons l’exposé de nos regrets en mentionnant la prolifération des interminables temps de chargement qui hachent l’aventure comme Geralt taillade les chairs corrompues. Pensez donc à vous munir d’un livre… Car si l’on est enclin à tolérer les latences qui ponctuent la transition d’un lieu à un autre, on est vite éreinté par la demie minute qu’il nous faut patienter avant de récupérer une sauvegarde ou de pénétrer à l’intérieur d’un bâtiment. Et comme de surcroît, le jeu vous renvoie assez fréquemment au bureau, on suppliera les développeurs de nous patcher tout ça très rapidement !
The Witcher est un jeu que l’on a envie de soutenir. Certes, on pourra lui reprocher de n’être pas à proprement parler un jeu de rôle, mais bien plutôt un hybride [excellent] entre le jeu de rôle et le jeu d’aventure. La fabuleuse richesse du scénario a contraint les développeurs à incarcérer le joueur derrière les barreaux de la personnalité de Geralt de Rivia et à réduire ainsi la variété des expériences qui, autrement, auraient pu lui être proposées. En contrepartie de cette rigidité, le développeur nous offre un héros dont le charisme n’égale que l’ambigüité, des PNJ à la personnalité travaillée, un monde aux interconnexions sophistiquées et des situations de jeu où tour à tour dominent la barbarie, le mensonge et l’équivoque. Il faut d’ailleurs saluer l’exceptionnelle maturité de la narration, l’efficacité jouissive du système de combat et le souci de cohérence causale qui entoure chacune de nos entreprises, tant de choses qui finalement tendent à flatter notre intelligence. The Witcher manque certes de beaucoup la perfection ; mais gageons que les quelques dizaines d’heures que vous aurez passées en sa compagnie se révèleront aussi inoubliables que celles passées aux côtés de vos bouquins favoris. Quand la distraction se fait soudain enrichissante…
18 novembre 2007 à 23h06

Par

Points positifs

  • Scénario, dialogues et mise en scène
  • Univers mature, expurgé de tout manichéisme
  • Système de combat dynamique
  • Durée de vie : près de 50 heures !

Points négatifs

  • Une liberté d'action cannibalisée par le scénario du jeu
  • Pauvreté des objets et des équipements à récupérer
  • Temps de chargement interminables
  • Retours au bureau intempestifs
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