Test : Kingdoms of Amalur : Reckoning - PS3

Kingdoms of Amalur : Reckoning - PS3
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Robert Anthony Salvatore, auteur reconnu dans la littérature fantastique, invente un univers qui sera développé dans plusieurs jeux. De cet univers, les Royaumes d’Amalur, il souhaite mettre en jeu vidéo un arc bien particulier. Cet épisode, il le développe en partenariat avec d’autres personnes. Lui-même se trouve à la tête de 38 Studios, tandis que Ken Rolston représente Big Huge Games, qu’il a rejoint en 2007 après avoir été lead designer sur Morrowind et Oblivion. A priori, il y a de quoi aboutir à un titre monumental. En tout cas le potentiel est là. Ajoutez la participation de Todd McFarlane, créateur de Spawn, et les talents commencent à s’accumuler à la limite de l’excitant. Alors pourquoi un résultat aussi peu original ?
L’histoire qu’on nous propose est celle d’un héros ou d’une héroïne (on vous laisse le choix de son apparence dans une certaine mesure), qui meurt sur le champ de bataille. Résultat d’une expérience menée par des gnomes, ce héros revient à la vie, libéré de tout destin. C’est alors le chaos qui commence. Vous êtes un être unique, le seul dans ce monde à défier l’ordre établi par le simple fait que vous existez. Vous avez le choix de votre propre destinée, et vos actes peuvent bouleverser celle des gens que vous rencontrez. Dès lors, vous devenez un objet de convoitise. On voudra vous tuer ou vous protéger, selon ce qu’on pense de la situation. C’est l’une des forces du scénario : les conséquences de vos actes étant imprévisibles, qui peut dire si vous faites le bien ou le mal, malgré vos intentions ? De plus, on vous proposera plusieurs voies pour poursuivre votre quête de vérité, apportant la possibilité de plusieurs histoires.

(MMO)RPG

Malheureusement, ce scénario prometteur est mal desservi par la réalisation du jeu. On a l’impression de se balader dans un World of Warcraft offline, un vaste monde peuplé de monstres et de PNJ statiques qui vous enverront faire des quêtes secondaires toutes plus insignifiantes et répétitives les unes que les autres. On ressent trop le fait qu’au départ, le jeu aurait dû être un MMORPG, mais a subi des chamboulements de production. Du coup, les équipes de développement semblent avoir cherché à modifier quelques mécaniques par-ci par-là pour pouvoir en faire un jeu solo. Le mélange entre les deux nous laisse un peu sur notre faim, il faut bien le dire. La narration en prend un sacré coup, se contente de dialogues basiques débités par des personnages aux animations rigides, on n’y croit pas une seule seconde. On se retrouve alors à progresser dans le jeu par automatismes, en lançant toutes les quêtes qu’on trouve pour les avancer quand on tombe sur la suite par hasard, simplement pour gagner des niveaux et de l’équipement. Pas très excitant, du moins dans les premières heures de jeu, le temps de s’habituer à ces défauts et de se retrouver dans des situations plus coriaces.

Combats et évolution

Le système de combat, en effet, est l’élément qui permet le plus de libertés. Le système d’évolution du personnage, outre quelques caractéristiques secondaires pour le craft ou le commerce, vous offre la possibilité d’évoluer dans trois directions assez classiques dans le genre : puissance, sorcellerie et finesse. Chacune des branches a des sorts et coups spéciaux à débloquer, et on peut répartir ses points dans toutes les branches sans souci, avec pour seule limite des paliers qui donnent accès à d’autres pouvoirs. Ces points servent ensuite à déterminer quel équipement vous pouvez porter. Au début, vous pouvez mettre à peu près tout, mais vous finissez par être aiguillé dans telle ou telle direction si vous voulez éviter de garder votre équipement de débutant à la longue. Vous avez également le choix entre de nombreuses armes (vous en équipez deux à la fois), qui se distinguent par la puissance, la vitesse ou la portée, de sorte que vous pouvez réellement décider ce que sera votre expérience de jeu sur ce point. Certaines armes ont par ailleurs un atout : approchez un ennemi par derrière en mode furtif pour l’assassiner sans prendre de risque. C’est toujours bon à prendre! Les armes ont aussi des caractéristiques magique, occasionnant des dégâts de feu, foudre, glace et poison, mais on s’en préoccupe très peu, l’issue d’une bataille étant généralement due à vos bons réflexes.

Bon choix, mauvais choix... Pas le choix !

Ce serait presque le seul bon point du jeu. La fluidité des combats, c’est dommage, est brisée par une gestion d’inventaire insupportable (il y a énormément d’objets sur votre chemin, mais les trois quarts sont inutiles, et se débarrasser des objets en trop dans votre inventaire pour en ramasser de meilleurs est fastidieux), ainsi que par des phases de dialogue faussement décisives. « Un bon jeu est une suite de choix intéressants », comme le dit Sid Meier, mais les choix qu’on nous présente ici ne semblent pas avoir la moindre influence sur quoi que ce soit. D’une part on ne comprend pas toujours quelles peuvent être les implications de telle ou telle réponse et on choisit au hasard, d’autre part une mauvaise réponse, au final, vexera votre interlocuteur mais il vous dira quand même tout ce qu’il y a à savoir pour que vous puissiez progresser. Au final on ne lit même plus les dialogues, on zappe cette étape obligatoire au plus vite pour se rendre au prochain point de quête. L’exploration du vaste continent se trouve parasitée par quelque soucis de navigation dans ce style, ainsi que par une réutilisation abusive des mêmes décors (il y a environ 3 modèles de maison différents, et on a parfois l’impression que c’est la dixième fois qu’on rentre dans une grotte alors qu’on n’y a jamais mis les pieds). Et nous voilà avec un jeu comparable à un mur de briques qu’on aurait oublié de lier avec du mortier. C’est fragile, et ça s’écroule au moindre choc.

L'art de savoir conter

Si le projet était resté un MMO, tout ceci aurait pu fonctionner. Dans les jeux communautaires, l’important est d’avoir un univers très riche dans lequel on peut agir auprès de plein de personnages, c’est un contexte dans lequel le joueur, pour raconter sa propre histoire, tissera des liens avec les autres joueurs et partira à l’aventure avec eux. Mais dans un jeu solo, il peut y avoir une quantité infinie de choses à faire, ça ne fera pas pour autant une aventure intéressante. Quand votre personnage n’a aucun charisme et affiche invariablement la même expression neutre, quand il ne tisse de relation avec aucun personnage secondaire, quand son voyage n’est qu’une succession de rencontres avec des villageois perdus et des créatures agressives, on ne se laisse pas facilement embarquer. Certes, le principe d’un « jeu de rôle » est d’imaginer soi-même son aventure, de créer sa propre histoire à partir d’un contexte donné, mais si ça fonctionne à quelques-uns autour d’une table avec une poignée de dés, chacun créant sa propre vision du monde dans son esprit, la progression étant sujette à des débats animés, ça marche moins lorsqu’on est seul devant un écran. Le jeu, par sa représentation visuelle et sonore, prend de nombreux partis pris sans oser s’aventurer dans le récit (alors qu’il puise toute sa force de la dimension littéraire du genre !). Et sans une bonne narration, l’aventure est fade, et nous en avons là un bon exemple. En ne gardant que les systèmes de combat et d’évolution, les développeurs auraient pu sortir un très bon beat them all, classique mais efficace, sans s’embarrasser de tout ce bricolage faussement roleplay qui gêne l’appréciation de l’histoire au lieu de la servir.

Bon voyage

Quand on voit le travail qui a été apporté au décor et au design des ennemis, on se dit que c’est dommage. En effet, si on prend le temps de passer outre cette narration bancale et cette répétitivité peu encourageante, on découvre des paysages tout à fait réussis (si on ne se laisse pas décourager par le clipping). Un petit regret tout de même, la variété met du temps à arriver. On peut alors trouver un intérêt au jeu dans son exploration, en abandonnant tout attachement aux différentes histoires (on se dépêchera quand même de faire les quêtes principales pour aller plus loin), et peut-être est-ce là qu’on commence à créer son aventure propre. C’est tout de même embêtant que pour en arriver là, on mette de côté les centaines de personnages (qui ont tous une voix !) et les dizaines de quêtes associées. Si ces nombreux PNJ que vous croisez vous horripilent, vous avez même la possibilité de tous les agresser et les assassiner, à moins qu’ils n’aient de l’importance dans le scénario central. À vous d’assumer les conséquences en devenant un hors-la-loi, ou en purgeant une peine de prison ! Vous pouvez même rater définitivement une quête secondaire en tuant un personnage qui y est lié. Et là, on commence à entrevoir ces fameux « choix intéressants », non pas dans le scénario imaginé par les créateurs du jeu, mais dans les limites et les libertés données au niveau de l’action, faisant de ce jeu un bac à sable plutôt qu’un vrai jeu fantastique.
Vous l’aurez compris à la structure de ce test, nous voici avec un jeu qui nous laisse une impression mitigée, entre ses très bons choix et ses gros ratés. Pour résumer, le très vaste contenu proposé par Les Royaumes d’Amalur : Reckoning est trop parasité par les imperfections de sa réalisation pour en faire un jeu digne de ce nom. Les quêtes sont nombreuses, les choix d’évolution intéressants et laissant le loisir de varier le gameplay, mais le scénario classique, les animations rigides et la redondance des décors empêchent de s’immerger complètement dans ce riche univers. En revanche, son rapprochement avec le genre MMO laisse penser que sa suite annoncée, le « Projet Copernic », fera un excellent jeu en ligne s’il est mieux soigné. Si la quantité vous intéresse plus que la qualité, ceci dit, Reckoning saura vous conquérir sans grande difficulté.
04 avril 2012 à 21h44

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Points positifs

  • Le système d'évolution et de combat
  • Le décor, le bestiaire
  • La quantité de choses à faire

Points négatifs

  • Une narration trop décousue
  • Des personnages rigides
  • L'intérêt de faire ces choses

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