Test : Disgaea : Afternoon of Darkness - PSP

Disgaea : Afternoon of Darkness - PSP
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Sur nos terres européennes, les RPG pour PSP ne sont pas légion, et les membres de la branche Tactical-RPG sont parmi les plus rares. Après un excellent Final Fantasy Tactics : The War of the Lions, c'est au tour de Disgaea : Afternoon of Darkness de venir aborder la portable de Sony. Et il ne vient pas sans antécédents, puisqu'il s'agit du portage de Disgaea : Hour of Darkness, celui-là même qui a fait très mal sur PS2.
"Bon sang de bonsoir, se dit le lecteur atterré, possesseur de PSP et ivre de rage, encore un de ces fichus portages qu'on ne voit que de trop sur ma portable préférée !" Alors d'emblée, je dis non. Non, parce que le portage en question, il est bon, même très bon, sachez-le d'emblée. Et le jeu porté, c'est un des tous meilleurs Tactical-RPG de la PS2, un de ceux qui font les lettres de noblesse du genre, mais ironie du sort, qui font aussi que ledit genre s'enterre dans les méandre du "hardcore-gamerisme", où seuls les plus motivés et courageux sauront aller au bout et en tirer la quintessence. Prenez donc votre courage à deux mains, parce que vous allez voir, cet après-midi aux relents ténébreux vaut le détour. Nous sommes donc à Netherworld...

Petite bastonnade entre amis

Késako Netherworld ? Disons que le terme d'Enfer se trouverait être le plus approchant, mais attention, pas l'Enfer brûlant rempli de lave où les démons sont rouges, cornus, se trimballent avec des tridents, et font subir aux âmes des tortures qu'elles sont de toutes façons incapables de ressentir. Non, ici ce serait plutôt un royaume de fantasy, façon manga, dominé par les ténèbres et tout ce qui va avec, en particulier le fait que les autochtones sont de nature plutôt démoniaque. Ces démons sont, ou plutôt étaient, gouvernés par le roi Krichevskoy (à vos souhaits !). Etaient, puisque vous vous doutez bien, il est trépassé, et c'est son fils, Laharl, qui aurait dû en théorie lui succéder. En théorie seulement, n'oubliez pas que nous parlons d'un royaume démoniaque, ce qui fait que les habitants ont des moeurs traîtresses et belliqueuses, et je vous le donne en mille, chacun fait sécession de son côté. Ce n'est que deux ans après la mort du roi que l'on prend le contrôle de Laharl pour aller reconquérir son royaume, et pour cause : le bougre faisait une "sieste" et n'était absolument pas au courant pour son paternel décédé.
Non, ce n'est pas une impression, et l'on aborde là un des premiers points forts du jeu : l'ambiance dans Disgaea est à tendance loufoque, dingue, ou plus sobrement, fortement humoristique. Le scénario a beau avoir l'air assez bâteau, un prince qui part à la conquête de son royaume les armes à la main, il n'empêche que le tout est très bien fichu, les personnages sont attachants, et c'est vraiment le côté un peu loufoque de l'ensemble qui permet de créer une atmosphère et une ambiance extrêmement prenantes. Le seul soucis, et il est de taille, persiste depuis des années et a déjà maintes fois gâché le plaisir des non-anglophones / anglophobes : il n'y a pas une seule trace de localisation en français, que ce soit pour les voix ou pour les sous-titres, ce qui pour ces derniers aurait quand même pu être un minimum. Par contre, si la langue anglaise, voire japonaise puisque c'est l'un des privilèges de cette version PSP, ne vous rebute pas, vous allez êtres à la fête avec des dialogues savoureux doublés par des voix délirantes.
Un petit tour côté chiffres, puisque cette reconquête du trône, et plus si affinités (histoire, sans en dévoiler, de vous donner envie de vous y mettre), se compose de 14 chapitres, chacun étant en fait une bataille obligatoire. Il n'y a évidemment pas que 14 combats à faire dans Disgaea, mais le fait est que si vous voulez faire l'aventure d'un coup d'un seul, sans vous préoccuper de ce qu'il y a à côté, c'est tout ce que vous aurez. D'un autre côté, il vous sera sans doute difficile de passer à côté du reste, mais patience, on y revient plus tard.

Beauté de l'âme, beauté du corps

Parce que, malgré toutes les polémiques qui courent ces temps-ci sur l'importance de la partie technique dans les jeux, rien ne vaut une bonne histoire mâtinée de belles images et de sons qui flattent les oreilles. Bon, passons d'emblée sur ce qui fâche : les décors dans Disgaea sont pauvres, peu détaillés avec des textures pas bien jolies et, malgré quelques magnifiques fonds pour tenter de relever le tout, assez indignes du reste. Et dans ce reste, on trouve LE gros point fort graphique du jeu, à savoir le design en 2D. Que ce soient les portraits lors des dialogues ou les personnages sur le champ de bataille, ça transpire la belle patte manga et l'envie d'en mettre plein les mirettes, avec des détails à foison et une palette de couleurs très agréable à l'oeil qui rappelle d'autres grands titres du RPG 2D comme Legend of Mana ou Saga Frontier 2 (au passage, dieu du Playstation Store, si tu nous écoutes...). Et mieux encore, non seulement c'est beau, mais en plus, pour du sprite, ça bouge plutôt bien, avec des animations qui gardent bien l'esprit "pas sérieux" et manga de l'ensemble.
La partie sonore n'est pas en reste, en proposant côté musique une alternance, toujours pour coller avec l'esprit assez décalé du titre, entre des thèmes à connotation épique lors des affrontements et des thèmes plus légers pour les moments plus drôles. Et justement, on en vient au moment où ça ne rigole plus du tout, puisque l'on va décortiquer le gameplay chers amis !

Les nouvelles idées, clés de la réussite !

Or donc, Disgaea n'est pas un simple T-RPG qui s'amène simplement avec les bonnes idées des autres, une histoire sympa et de jolis graphismes, sûrement pas, ça serait trop facile. Sachez donc en premier lieu, si vous avez déjà eu la version PS2 entre les mains, que s'il n'y a pas de nouveautés côté jouabilité, rien n'a été enlevé non plus, et vous aurez l'amabilité de laisser lire vos petits camarades qui eux ne savent pas quelles sont lesdites nouveautés. Le premier changement concerne les actions. Dans un Tactical "traditionnel", vous sélectionnez vos personnages les uns après les autres, vous donnez vos ordres, vous validez, et tout ce petit monde exécute vos désirs d'un seul coup. Ici, bien qu'il soit toujours possible de procéder de cette façon, vous pouvez également faire au cas par cas : sélection du personnage, ordre, et là, vous avez le choix entre le faire taper immédiatement, ou attendre d'avoir placé ses coéquipiers pour déclencher combos et attaques groupées, ces dernières étant de nature un peu aléatoire, mais synonymes de points supplémentaires pour augmenter la quantité d'expérience et d'équipements que vous recevrez en fin de combat.
Autre action inédite : le lancer. Nouvelle discipline pour les prochains J.-O. de Netherworld, cette commande permet à vos personnages d'attraper une créature ou un personnage à proximité, allié ou ennemi, quel qu'il soit, et, vous l'aurez compris, de le lancer. Si ça peut paraître sympathique au premier abord, il faut prendre en compte quelques paramètres, puisque si Netherworld est un endroit tout sauf réaliste, ça fait quand même mal quand quelqu'un vous envoie valser ; de plus, vos ennemis, s'ils subissent aussi des dégâts en cas de chute, peuvent aussi fusionner et devenir plus puissants si vous les envoyez les uns sur les autres. Vous arrivez à suivre ? Tant mieux, parce que ce n'est pas fini, et pardon d'avance pour le mal de tête. On dit ce genre de jeu tactique, Disgaea introduit non plus seulement la tactique, mais aussi la "géotactique" ! Pour essayer de faire simple, lors des affrontement, le terrain est découpé en cases bleues et rouges de façon aléatoire, lesquelles cases représentent deux zones d'effet. Non pas de sort ou d'attaque, mais de bonus positifs ou négatifs générés par des "géosymboles". Ce sont des cristaux, placés comme les cases de façon aléatoire, qui diffusent lesdits bonus sur les zones de même couleur, et qui affectent autant vos combattants que ceux de l'ennemi. Tactiquement, vous avez deux choix : soit vous détruisez le cristal, et annulez donc le bonus pour le reste de la bataille, soit vous tentez de l'utiliser de façon plus réfléchie, en le faisant bouger sur la couleur de zone où vous avez le plus d'unités si c'est un bonus positif, ou plutôt sur les cases avec des ennemis si c'est un bonus négatif. Si vous avez eu du mal à saisir ce que vous venez de lire, dites vous que si dans la pratique c'est plus clair, à haut niveau ça devient en plus très, très compliqué à gérer !

"Ne sous-estime pas la puissance du Côté Obscur !"

Allez, rassurez-vous, on en a fini là avec les mécanismes stratégiques compliqués mais finalement ô combien prenants une fois qu'on en a l'habitude ! Maintenant, attaquons-nous à l'art délicat de la politique et de la gestion démographique, mais hautement simplifiées, ne tremblez donc pas comme ça, autrement ça ne serait pas amusant du tout. Netherworld est une monarchie, certes, mais parlementaire : l'Assemblée Noire, c'est un peu le Sénat de chez nous, mais en plus démoniaque. C'est notamment lors des sessions de l'Assemblée que vous pourrez créer, ou plutôt proposer la création de nouveau héros au vote démonico-populaire, ou soumettre des lois sur le prix des objets, la disponibilité des objets rares, l'augmentation de vos propres finances, etc., le résultat dépendant de la sympathie des sénateurs à votre égard. Bien entendu, vous pourrez les corrompre allègrement sans aucun remords, ou leur taper dessus pour leur faire changer d'avis (auquel cas vous risquez d'en avoir, des remords), mais après tout, vous comme vos vassaux ne sont pas démoniaques pour rien... L'Assemblée joue également un rôle crucial dans la navigation entre les 150 classes proposées dans le jeu, mais également dans le passage de niveaux, avec un examen sous forme d'affrontement que vous devrez remporter avec le personnage que vous faites progresser.
Ultime originalité de Disgaea, le Monde des Objets. Si vous trouviez que 14 chapitres, c'est peu, accrochez-vous bien, car là vous allez êtres servis ! En effet, chacun des objets en votre possession représente un monde différent, avec une pléthore d'étages à parcourir, tout en sachant qu'il faut en traverser au moins 10 pour pouvoir sortir de l'objet. Dans ces objets, vous croiserez, en plus des résidents, les maîtres de chaque objet. Montrez-leur qui est le patron, et ils utiliseront leurs compétences spéciales pour renforcer la puissance de vos objets. Ensuite intervient la gestion démographique : chacun des objets possède donc des habitants et des maîtres, et vous pouvez tous les faire passer d'un objet à un autre pour profiter de leurs capacités spécifiques, avec toutefois des limites de population en fonction de l'objet.
Ouf, ça y est, nous voilà arrivés au bout de ce descriptif dans les grandes lignes, même s'il y a encore tant de petites subtilités que je vous laisserai donc découvrir par vous-mêmes. Sachez toutefois que côté gameplay, le tableau n'est pas totalement rose pour autant. Si tactiquement, les possibilités offertes sont tout simplement énormes, et qu'on en profite avec délice, les adversaires gérés par la console sont par contre du genre à se contenter de peu : ne jouez pas défensif, parce qu'en face ils ne viendront tout simplement pas vous chercher ! A croire que, comme pour les géosymboles, les ennemis ont des zones dédiées, puisqu'ils ne bougeront pas vraiment à moins que vos personnages n'arrivent à une certaine distance. Second reproche, cette fois plus par rapport à l'exploitation du support : il va falloir que certains développeurs se mettent dans la tête que la PSP, contrairement à la PS2, ne dispose que d'un seul joystick, ce qui fait que dans Disgaea comme dans un certain nombre d'autres titres, c'est un peu la croix et la bannière pour avoir des angles de caméra corrects !
Par contre, et comme quoi pour les angles de caméra ils auraient pu faire un effort, le passage sur PSP s'est accompagné de l'arrivée d'un mode multijoueur à deux en mode ad-hoc. Duels acharnés et objets inédits sont au programme, mais si déjà tout seul vous parvenez à retourner l'intégrale intégralité du jeu, chapeau bas. Sur ce, chers amis, je ne sais pas vous, mais moi j'ai un royaume démoniaque à gouverner.
Disgaea : Afternoon of Darkness, c'est le genre de titre qui vous réconcilie avec un style de jeu que vous aviez abandonné, ou qui vous conforte dans vos goûts vidéoludiques, bref, c'est un grand jeu. Avec son histoire d'apparence classique en diable mais tellement bien enrobée qu'elle est extrêmement plaisante à suivre, Disgaea vous plonge dans des merveilles de gameplay qui font largement honneur au Tactical-RPG, et qui risquent fort de vous tenir devant la console un bon moment. Si vous vous laissez prendre par la magie du titre, vous fermerez sans aucun regret les yeux sur les petits défauts ici et là. En revanche, inutile de se cacher que c'est un jeu complexe, voire peut-être élitiste par certains côtés ; donc essentiellement destiné à ceux qui auront le courage d'aller chercher toute sa richesse. Les autres resteront sans doute de marbre, bien qu'il ne faille pas grand-chose pour succomber, et c'est tant mieux : en ces temps où l'on veut tout simplifier, louons ces jeux qui nous proposent encore de vrais défis !
25 mars 2008 à 23h30

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Points positifs

  • Système de jeu très poussé
  • Mode multijoueur
  • Design des personnages
  • Ambiance et humour

Points négatifs

  • Système de jeu trop poussé ?
  • Bêtise des adversaires
  • Soucis de caméra
  • Pas de localisation française
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