Dans une industrie qui voit toujours plus de suites sortir, le renouvellement du gameplay est une préoccupation permanente pour les développeurs qui cherchent à ne pas lasser les joueurs. Mais les jeux étant aussi de plus en plus chers à produire, bouleverser une recette qui fonctionne, c'est courir le risque de décevoir les fans et de voir chuter les ventes. Ce n'est donc pas une option envisageable. Alors les studios se creusent la tête pour ajouter toujours plus de features et de couches au gameplay. Mais qu'est ce que cela apporte au final ? De la variété ? Du fun ? Le jeu précédent ne l'était-il pas assez ? Comprenez bien que si l'ajout de nouvelles possibilités est une bonne chose, encore faut-il qu'elles soient bien pensées, s'intègrent parfaitement au jeu, et apportent autre chose que simplement des actions supplémentaires à effectuer. Un bon exemple du genre est l'introduction de la bourse dans
GTA V. Cette dernière est totalement pertinente vu le thème du jeu de
Rockstar. Au contraire, la bataille navale dans
Assassin's Creed III, aussi bonne soit-elle, tombe comme un cheveu sur la soupe, tant elle est à part dans le jeu, ne lui apportant pas grand chose au final, si ce n'est un écran de fumée masquant la mollesse générale du titre. Mais le pire ajout qui soit reste encore les objets à récupérer. Il n'y a rien de plus artificiel et inutile, et pourtant, c'est une chose qui se généralise. Collectionner des thermos à café dans
Alan Wake, ça casse complètement l'ambiance, en plus d'être totalement hors-sujet. Et malheureusement, les exemples sont nombreux.
Pour bien faire, il faut intégrer le gameplay à la narration, que ces règles qui régissent les actions du joueur soient aussi créatrices d'émotions, ou porteuses du discours. Il existe déjà quelques exemple, mais ces derniers sont trop rares.
Ico avait fait fort en forçant le joueur à maintenir un bouton appuyé pour tenir la main de Yorda, créant ainsi un lien réel, physique, entre lui et le personnage virtuel. Plus récemment,
Naughty Dog a utilisé le gameplay pour appuyer l'incapacité d'Ellie à nager, via des séquences répétées où il faut lui faire traverser une étendue d'eau sur une palette. Apparemment anodines, ces petites séquences prennent tout leur sens quand la jeune fille tombe à l'eau, vers la fin du jeu. Le joueur comprend alors instantanément qu'Ellie est en danger de mort et se rue pour la sauver. En quelques secondes, le joueur passe de l'exploration tranquille au gros coup de stress. Mais bien sûr, pour que cela fonctionne, il faut qu'il se soit attaché au personnage, d'où la nécessité de soigner l'écriture des personnages, de prendre le temps de les développer. À ce niveau-là, des jeux indépendants, comme
DLC Quest et
Paper Please, ont déjà démontré qu'il était possible de baser toute la narration d'un jeu sur son gameplay, et de s'en servir pour faire passer un message, tout en conservant des mécaniques de jeu simples. L'air de rien, nous touchons du doigt un sujet extrêmement important : l'écriture vidéo-ludique. Et cette dernière constituera probablement un des principaux facteurs d'innovation, d'évolution de notre média.